15/04/2009
Ferguson
Jünger toujours, parmi d’autres lectures :
« Kirchhorst, 10 décembre 1944. (…) Lorsqu’ Arras tomba en 1493 entre les mains des Autrichiens, ceux-ci gravèrent ces mots au dessus de l’une des portes :
QUAND LES FRANCAIS PRENDRONT ARRAS, LES SOURIS MANGERONT LES CHATS.
Lorsque les Français prirent la ville, en 1640, ils se bornèrent à gratter le p de l’inscription. Cet exemple montre que la réplique peut agir plus sobrement, et en même temps avec plus d’esprit, qu’une provocation arrogante. Cela m’a frappé en France, tout récemment encore, à propos de la propagande. Par exemple sur les énormes affiches où l’on voyait un ouvrier français en Allemagne, devant une machine, l’air heureux de vivre. La contre-propagande nocturne s’est bornée à un simple anneau, tracé à la craie, et passé dans les narines de ce personnage. »
Et, plus loin, apprenant la mort de son fils, combattant en Italie, prés de Carrare :
« Ernstel est mort, tué à la guerre, mon brave enfant- mort déjà depuis le 29 novembre de l’an dernier ! La nouvelle nous est arrivée hier soir, 11 janvier 1945, peu après 7 heures. (…) Cher petit. Depuis l’enfance, il s’appliquait à suivre son père. Et voici que, du premier coup, il fait mieux que lui, le dépasse infiniment. La mort de mon fils constitue l’une des dates, l’un des pivots et des tournants de ma vie. Le choses, les pensées, les actions ne sont plus pareilles, avant et après»
Je ne peux que le rejoindre, sans savoir si perdre un fils adulte est plus difficile que perdre un enfant.
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Quelques jours dans ma retraite Quercynoise, sur les bords de la Dordogne. Indépendamment de la disparition de tout réseau téléphonique fiable, gage de tranquillité s’il en est, c’est le silence qui m’enchante. Tout semble hors du temps, immobile. Les paysages millénaires, les vieilles pierres rouges, les clochers sentinelles, les vieilles bastides au flanc des collines. Quelque bruit de tracteur au loin, le vent dans les arbres, le tonnerre avant l’orage…J’en viens à guetter les nouvelles du dehors en captant des bribes de France Inter en passant, quelques outils à la main : nouvelles invasions barbares gares de Lyon, nouvelles avancées décisives dans la lutte contre la discrimination, veulerie de nos modernes et ineptie et vulgarité sans bornes de notre époque, dés lors que l’on prend un minimum de recul.
« Ca va vite… » me suis-je dit ce matin avec deux gamins sur mon tracteur Harry Ferguson, sorti des usines de Coventry vers 1949…Je me revoyais, enfant, dans la même situation avec mes frères et cousins, mon grand-père au volant. Ouais…
Sourcillement suspicieux du bougnat à beret, couperose et clope au bec, quand je pose sur son comptoir de merde Rivarol, La france agricole et le monde diplomatique. Ah, ah, ah. (je sais, il m'en faut peu)
19:18 | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : junger, kirchhorst, dordogne, ferguson, rivarol
Commentaires
Le silence et la nuit : derniers luxes qui nous restent, mon pauvre et cher ami. Pour combien de temps encore ? J'étais il y a quelques mois en villégiature dans un minuscule hameau (cinq maisons) perdu dans la garrigue gardoise. Toute la nuit, deux lampadaires publics brûlaient...
Écrit par : Didier Goux | 15/04/2009
Joli.
Écrit par : Hank | 15/04/2009
Ça me fait penser à une époque où je travaillais dans les Maritimes (est du Canada) et que j'occupais un chalet au bord de la mer. J'aimais marcher sur la plage et me rendre au bout d'un cap où il y avait une vieille maison de deux étages abandonnés.
Je revenais à la tombée du jour pour lire D.H. Lawrence et m'endormir au bruit du ressac tout près...
C'était presque aussi fabuleux (moins beaucoup moins bucolique, la nature y étant plus rude) que ton environnement idyllique de la campagne française.
Merci de ton compte-rendu.
Écrit par : Trader | 15/04/2009
Vos nostalgies géorgiques ou bucoliques me foutent le bourdon. C'est pas le moment de relire Lawrence, ou Virgile. N'oubliez pas qu'il y a un Leviathan à zigouiller. Si on les laisse faire, ils vont transformer jusqu'au dernier village de France en "espace antistress" ou je ne sais quelle connerie subventionnée par la péréquation, et jusqu'aux derniers comtés en länders.
Écrit par : Porteur | 16/04/2009
Repos à la campagne ? Ne nous méprenons pas, je pense qu’Hoplite se repose entre deux campagnes.
Écrit par : festfury | 16/04/2009
didier, "Toute la nuit, deux lampadaires publics brûlaient..." sûrement quelque manifestation festive?
merci hank
trader, j'ai quelques bons souvenirs également de la campagne québécoise...et des rives du saint laurent. certes une nature plus sauvage. DH Lawrence au crépuscule, diantre, tu ne te mouches pas du coude!
porteur, vous avez raison...mais je n'ai rien d'un Don Quichotte...je contemple juste cette époque avec un regard singulier et désabusé. pas forcément triste pour autant.
festfury, les campagnes hoplitique avaient lieu l'été généralement, aprés les récoltes. et duraient peu: dix, vingt jours, les travaux des champs ne pouvant se passer de main d'œuvre...les engagements étaient brefs (essaie de combattre une heure avec la panoplie de combattant..) et meurtriers mais peu au regard de nos guerres modernes. puis chacun regagnait son logis aprés la bataille. j'essaie souvent d'imaginer ce que pouvait être la vie de tels hommes. Un livre extraordinaire pour ceux que cela intéresse, Le modèle occidental de la guerre de VD Hanson.
Écrit par : hoplite | 17/04/2009
Effectivement je ne suis pas un spécialiste, mais le sujet m’intéresse.
Après avoir lu l'Art de la Guerre de Sun Tzu, je me suis rendu compte que j’ignorais quasiment tout de la stratégie occidentale. Je vais me procurer ce livre. Merci
Écrit par : festfury | 17/04/2009
de rien; Hanson a écrit deux livres EXTRAORDINAIRES: le modèle occidental de la guerre, donc, qui décrit assez succinctement le combart dans la phalange hoplitique qui révolutionna l'art occidental de la guerre, puis l'évolution de cette façon rationnelle et hautement létale de combattre. Et Carnage et culture ou les grandes bataille qui ont fait l'occident. bonne lecture!
Écrit par : hoplite | 17/04/2009
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