Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

18/05/2012

in extremis

g_soros.jpg

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

"Il y a des projets importants qui doivent être mis en route comme si c'était pour hier, parce qu'ils sont la clef de la survie humaine. Malheureusement, ils ne peuvent être financés par les voies habituelles à cause de la nature tordue de l'économie de marché et de la finance globale, qui dicte que le seul but de l'investissement d'argent est de faire plus d'argent. Le projet d'éviter des conséquences désastreuses n'est pas une affaire lucrative, en soi, et ne se trouve pas financé. Mais importer de Chine des millions de citrouilles d'Halloween en plastique orange chaque année est un pari facile, et donc le marché donne priorité aux citrouilles en plastique orange sur ce qui est essentiel pour nous maintenir en vie. La main invisible du marché, il s'avère, est attachée à un invisible idiot.

(...) Enfin, nous avons les super-riches : ceux qui ont tout simplement trop d'argent. Des gens comme George Soros ou Bill Gates font grand cas de leur philanthropie, en promouvant la démocratie ou en combattant la malaria ; ne pourraient-ils pas aider ? Théoriquement ils pourraient (ils ont certainement l'argent pour) mais nous devons comprendre ce qu'ils sont. Ce sont des vampires. Ils ne sucent pas notre sang, littéralement, mais notre temps et notre labeur. Nous gagnons notre vie et une promesse de retraite de plus en plus vide (une fois que nous sommes trop vieux pour leur être utiles) sur une planète de plus en plus dévastée ; ils gagnent tous le reste. La façon dont ils confisquent notre richesse varie — Soros a volé les économies des gens en spéculant sur les marchés monétaires ; Gates a prélevé une taxe Microsoft en imposant au monde un système d'exploitation bogué, bouffi et branlant avec la complicité du gouvernement américain ; les Walton, qui possèdent Wal-Mart, l'ont fait en expédiant les emplois américains en Chine tout en mettant sur la paille les petits commerces aux États-Unis. Mais la façon dont ils distribuent leurs largesses ne varie pas : son but est de leur donner l'apparence d'hommes bons. Pour se donner un peu de perspective sur ce que cela signifie, voici un poème de Bertolt Brecht, traduit par Slavoj Žižek :

L'interrogatoire du Bon

Avancez : nous entendons
Que vous êtes un homme bon
Vous ne pouvez être acheté, mais la foudre
Qui frappe la maison, aussi
Ne peut être achetée.
Vous êtes fidèle à ce que vous dites.
Mais qu'avez-vous dit ?
Vous êtes honnête, vous dites votre opinion.
Quelle opinion ?
Vous êtes courageux.
Contre qui ?
Vous êtes sage.
Pour qui ?
Vous ne tenez pas compte de vos intérêts personnels.
De qui sont les intérêts dont vous tenez compte alors ?
Vous êtes un bon ami.
Êtes-vous aussi un bon ami des gens bien ?
Entendez-nous à présent : nous savons
Vous êtes notre ennemi.
C'est pourquoi nous allons
Maintenant vous mettre devant un mur.
Mais en considération de vos mérites et de vos bonnes qualités
Nous allons vous mettre devant un bon mur et vous abattre
Avec de bonnes balles d'un bon fusil et vous enterrer
Avec une bonne pelle dans la bonne terre.

Les super-riches ont donc deux fonctions dans la société. La principale fonction est d'aspirer la richesse de la Terre et de l'Humanité aussi efficacement que possible. La fonction ancillaire est d'en recracher un peu d'une façon qui les fasse passer pour les bienfaiteurs de la Terre et de l'Humanité. Mais il y a un problème avec cette balance des paiements : afin que la Terre et l'humanité puissent tirer un bénéfice net de leurs activités, il faudrait qu'ils en recrache autant, sinon plus, qu'ils en aspirent. Dans le processus, ils cesseraient d'être super-riches ; ils cesseraient effectivement d'exister.

Et nous voilà au point crucial de la discussion. La seule source de fonds possible pour notre projet de rendre la planète survivable pour les générations futures est les super-riches, mais dans le processus ils doivent cesser d'exister. L'approche de Brecht est à la fois simple et spectaculaire mais une option plus humaine peut être imaginée. Il y a un certain moment où les gens sont particulièrement malléables, lorsqu'il s'agit de se débarrasser de leur argent : sur leur lit de mort. À l'article de la mort, on médite inévitablement sur le fait que on ne peut l'emporter avec soi, la pensée d'un monde potentiellement déplaisant après la mort commence à tourmenter l'esprit... Avec la bonne sorte de persuasion, des résultat spectaculaires sont souvent obtenus par des prêtres, des dirigeants d'organisation non-lucratives et d'autres mendiants. C'est à ce moment qu'un boniment pour sauver ce qui reste de la planète peut réussir.

Imaginons notre super-patriarche à l'agonie. Rangées devant lui se trouvent ses diverses (ex-)épouses (dans un harem occidental les épouses sont espacées dans le temps aussi bien que dans l'espace, pour respecter les lois locales sur la bigamie) et leurs divers enfants, tous attendant leur bout de l'héritage. Il y a la vieille harpie tannée qui est passée la première, la femme trophée à présent fanée qui tentait de se maintenir avec des liftings, des implants et du Botox, mais ressemble maintenant à un animal baudruche partiellement dégonflé, et la jeune nymphomane, jolie mais sociopathe, qui sur le tard lui tient compagnie (ainsi qu'à ses gardes du corps). Ils sont tous hideux dans leur préoccupation hypocrite pour son bien être, souhaitant sa mort rapide. Les enfants sont hideux à leur propre manière : tous rompus à la saine rivalité fraternelle sur qui fera l'absolu minimum pour apaiser le monstre-papa et éviter d'être déshérité. Que quelqu'un se mette à soupçonner que le vieil ogre laissera tout le butin à son favori, et le favori est retrouvé dans la cave à vin, étranglé avec une écharpe de soie. Il y a une raison pour que les auteurs anglophones huppés écrivent tant de polars meurtriers, et c'est pour la même que les peintres paysagistes peignent tant d'arbres : c'est ce qui pousse là.

Mais alors un groupe de gentlemen dignes et austères arrive et demande une audience. Ce sont tous les membres authentiques d'une société secrète que notre patriarche souffrant connaît bien, et ils exposent un plan : son héritage doit être ajouté à leur trésor de guerre, qui sera utilisé à mener une guerre totale pour gagner un avenir survivable. Il mourra pour que la Terre puisse vivre. Le notaire est convoqué, les Dernières volontés et le Testament sont hâtivement amendées et signées, et le patriarche expire dans la béatitude.

Et si ça ne marche pas, alors il y a ce que Brecht suggère."

Dmitry Orlov, 2012.

Commentaires

C'est pourtant tout vrai ...
Mais ...merde !!!!....dans ces cas - là , on sort dans la rue , on se fache et on zigouille !!!....en groupe ...

Écrit par : chris | 18/05/2012

"La main invisible du marché, il s'avère, est attachée à un invisible idiot."

"Il y a une raison pour que les auteurs anglophones huppés écrivent tant de polars meurtriers, et c'est pour la même que les peintres paysagistes peignent tant d'arbres : c'est ce qui pousse là."

Très très bien.

Écrit par : Cotuatos | 18/05/2012

"Mais ...merde !!!!....dans ces cas - là , on sort dans la rue , on se fache et on zigouille !!!....en groupe ..."

Les Sorros ne trainent pas exactement dans les rues...

Écrit par : JÖ | 18/05/2012

""Mais ...merde !!!!....dans ces cas - là , on sort dans la rue , on se fache et on zigouille !!!....en groupe ..."

Les Sorros ne trainent pas exactement dans les rues..."

non. cela dit je ne crois pas aux sanctuaires absolus. les temps changent, on dirait.

"Il y a une raison pour que les auteurs anglophones huppés écrivent tant de polars meurtriers, et c'est pour la même que les peintres paysagistes peignent tant d'arbres : c'est ce qui pousse là."

ha ha!j'adore, aussi.

Écrit par : hoplite | 18/05/2012

Les commentaires sont fermés.