03/01/2015
mourir en bermuda?
(...) Le titre évocateur est « Crise ou coup d’état ? ». De la manière dont la question est posée, est-ce à dire qu’il s’agit plus d’un coup d’Etat que d’une crise financière ?
Michel Drac: Je pense qu’il y a une crise : le basculement latent du centre de gravité de l’économie-monde. Pour schématiser, la haute finance anglo-américaine a voulu capter l’offre de main d’œuvre asiatique pour achever d’écraser les peuples occidentaux, avec en arrière-plan l’idée que la montée en puissance de la Chine serait assez lente pour que les USA conservent toujours clairement le leadership technologique et militaire. La politique de Vladimir Poutine a été le grain de sable enrayant cette machine. Les USA doivent maintenant casser la Russie, ou à défaut l’éloigner de la Chine, pour conserver la prééminence malgré un déclin économique relatif, inéluctable vu le potentiel asiatique. S’ils échouent, le protectorat européen pourrait s’émanciper, dans la foulée d’une Allemagne qui penche de plus en plus clairement vers l’Est. La vraie crise, c’est cela. Elle est économique dans ses causes, géostratégique dans ses conséquences.
A côté de cette vraie crise, il y a un coup d’Etat déguisé en crise. Ce coup d’Etat, c’est la vampirisation de l’économie productive US et, à un degré moindre européenne, par une économie spéculative devenue folle. Il est très difficile de dire, en la matière, si ce coup d’Etat a été entièrement planifié, ou si, dans une certaine mesure, l’intelligence émergente construite par les marchés ne s’est pas en partie imposée aux oligarchies. Mais ce qui est certain, c’est qu’au final, tout s’est passé comme si par une politique systématique de mise en endettement, la haute finance avait préparé un ajustement brutal de la structure de classe et le démantèlement d’un modèle démocratique que nos oligarques jugement aujourd’hui inadapté, face à la montée en puissance d’un monde chinois qui, rappelons-le, n’a rien de démocratique. Ce coup d’Etat a pris la forme d’une crise financière, mais en réalité, je pense avoir montré que cette crise-là, la crise des subprimes, pour dire les choses simplement, a été fabriquée, et qu’elle vise en réalité à garantir le pouvoir des oligarchies malgré l’autre crise, la vraie, celle qui se joue à l’échelle géostratégique.(...) En France, la défection du président De Gaulle a-t-elle été le début de la fin ?
MD: Disons que c’est le moment où la France a eu confirmation qu’après sa mort (entre 1916 et 1940), elle n’avait pas le droit de renaître. La tentative gaulliste était de toute manière vouée à l’échec. Mai 68 n’a jamais été que le moment où un peuple exténué s’avouait à lui-même qu’il ne désirait plus qu’une chose : mourir en jouissant. Mais bon, ceci nous entraînerait trop loin du sujet. Ce qui est sûr, c’est que le régime gaulliste refuse les accords secrets sur la non-convertibilité du dollar, accords passés sous l’égide de Londres dès 1966. Et que ce même régime gaulliste « saute » peu après avoir envoyé paître la haute banque basée à Londres. Cherchez à qui le crime profite…
Obama incarne-t-il un espoir selon vous ? Ou est-ce celui de Wall Street ?
MD: Je crois surtout que ce brave Obama n’est pas grand-chose. Si l’on examine sa biographie, on remarque qu’il a été détecté, à l’université, dans les années 80, par un prof de haut renom (Brzezinski), ex-conseiller spécial du président Carter et secrétaire général officieux de la Commission Trilatérale. On me permettra de penser qu’il doit sa carrière à son immense talent… et aussi, un peu, au soutien de la Commission Trilatérale ! La composition de son administration ne laisse guère de doute quant à ses affinités réelles. Cette administration est entièrement peuplée, aux échelons clefs, d’hommes de Wall Street. Peut-on voir des adversaires de Wall Street dans un Summers, dans un Geithner, tous deux disciples de Robert Rubin ? Je ne le pense pas. A mon humble avis, Obama doit sa place au fait que l’oligarchie US s’est dit qu’il serait temps de mettre un Noir à la tête du pays. Changeons la couleur du président pour ne pas avoir à changer de politique. Je crains que ce ne soit pas plus compliqué que ça. Ne jetons pas la pierre à Obama. Il n’est rien, au fond. Juste un bon acteur embauché pour remplacer un acteur déplorable. Ce sera le plus grand président américain depuis George W. Bush ! Un ami américain me disait l’autre jour que quand un président venait de prêter serment, on l’emmenait dans le bunker sous la Maison Blanche pour lui montrer un film sur l’assassinat de Kennedy. Le film qui dit la vérité. Puis on lui posait la main sur l’épaule, et on lui demandait : « Mister President, do you have a question ? » Le pire, c’est que ça se passe comme ça !
Comment voyez-vous l’évolution de la situation économique mondiale ?MD: Il est difficile de répondre à votre question pour deux raisons : d’abord nous ne savons pas ce que seront les prochains mouvements des acteurs, ensuite il n’est pas du tout certain que nous ayons encore les vrais chiffres. La FED a étendu son bilan dans l’opacité la plus complète, et les opérations hors bilan sont semble-t-il énormes. Si la logique est respectée, l’actuelle fausse reprise va se poursuivre tant que les taux directeurs resteront nuls. Puis, à un moment qu’il n’est pas possible de préciser, la FED sera obligée de remonter ses taux pour empêcher un effondrement du dollar. Alors le système repiquera du nez, et on entrera dans une deuxième vague de la crise, probablement bien plus violente que la première vague. Le facteur déclenchant a de fortes chances d’être la sortie définitive de la Chine de la zone dollar, et l’établissement d’un nouveau système financier international. La configuration exacte de la crise dépendra en grande partie de la nature de ce système. C’est sans doute ce qui se négocie actuellement en coulisse. Pour nous, Européens, le risque est de faire les frais d’un accord in extremis entre Chine et USA.
Quelles solutions serait-il judicieux d’y apporter ?MD: La révolution ! Nous entrons dans une période cruciale et historiquement intéressante. Pour la première fois depuis des siècles, les peuples vont se retrouver dans la situation d’avoir à choisir entre l’esclavage et la révolution. Cela sourde d’ailleurs littéralement de partout. Et en particulier, je vous le ferai remarquer, aux USA. « The Revolution, a Manifesto », est le titre d’un best-seller rédigé par Ron Paul. « Don’t start the revolution without me » est celui d’un autre best-seller, rédigé par Jesse Ventura. En Europe même, la rébellion est aux portes. En France, il y a eu des millions de personnes dans la rue, récemment, pour refuser la politique socioéconomique du gouvernement Sarkozy. En Allemagne, et c’est peut-être, pour nous, le plus important, il y a des signes de plus en plus probant de la révolte latente de la nouvelle puissance allemande contre son brutal protecteur américain. Je crois d’ailleurs que le coup de grâce, pour l’Empire, pourrait bien venir de là. Le moment décisif ne sera pas celui où les peuples vont se révolter par la rue mais où une partie des élites va entrer en révolte contre une autre partie, où une partie des élites européennes va se tourner vers Moscou. C’est ce moment qu’il nous faut préparer. Parce qu’à ce moment-là, à part commenter, il y aura enfin quelque chose à faire.
09:16 | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : michel drac
Commentaires
Pas de comms!la photo de cet article y est en partie la cause peut-être. .
Obama l'imposteur:entendu dans un echange entre( de memoire) Georges Lane et "FG"je crois,FG expliquant pourquoi et comment ceci selon son analyse;hoplite et d'autre je pense,vous avez du voir le debat entre MD et GL,peu de sujet semblaient les accordés..
Adb,GL,JGM,FG,FF,(excusez des acronymes mais en ecrivant les noms j ai l impression de denoncé!) et d'autres chroniqueurs,analystes ou peutetre journalistes(semblent etre de tribord :)) ont d evidence de bonnes idees,bons conseils,animés d'idees salutaires meme si tous ne se rejoignent pas sur des fondamentaux..quel malheur,celles ci ne seront jamais appliqués je crois.
Écrit par : Dom | 03/01/2015
Auteur sincère et intéressant, Michel Drac est allé jusqu'à se lancer dans la création d'une "base autonome durable" ... qui a foiré mais dont il m'a dit l'été passé qu'il s'est proposé de la remettre sur pied. Il faut du courage pour relever de tels défis, parmi une mouvance pleine de bavards, de flics et de types inutilement vélléitaires.
Écrit par : Oscar | 03/01/2015
Drac a dit aussi que la revolution c'est un truc de jeunes...
Écrit par : JÖ | 03/01/2015
JÖ, c'est un des gros problêmes des pays occidentaux..
Écrit par : hoplite | 03/01/2015
C'est pour ca qu'on en importe d'ailleurs, en fait, pour avoir de quoi la faire, "la revolution"...
Écrit par : JÖ | 04/01/2015
Pour une révolution, il faut une opposition de classes. Pas une population qui aime sa cage et qui souhaite simplement qu'elle soit aussi dorée qu'autrefois.
Écrit par : Sven | 04/01/2015
"Pour une révolution, il faut une opposition de classes"
Pas obligatoirement.
Des elites incompetentes, traitres et opulentes quand le reste creve ca peut etre une bonne condition mais il faut que le reste creve vraiment, c'est sur.
Faut aussi que des gens declassés aient envie de prendre la place de l'elite.
Il faut donc tomber tres bas.
Écrit par : JÖ | 04/01/2015
La photo est sublime
Elle en dit plus qu'un long discours
Écrit par : kobus van cleef | 04/01/2015
à JÖ ... "I catch your point".
Opposition de classes, eh bien non ce n'est sûrement pas de ça qu'il s'agit mais d'une opposition entre races spirituelles. Elles coïncident objectivement avec des réalités sociales car la race spirituelle au pouvoir tire rageusement la couverture à elle, mais il ne faut pas se leurrer : il ne faut jouer son Marx. Avec tous ces cons de gauchistes. Ces idiots utiles.
Écrit par : Oscar | 05/01/2015
"opposition entre races spirituelles."
Vous voulez dire "l'esprit bourgeois" non ?
J'aurai envie de vous dire que le maoisme est encore là en France, presque pire que le marxisme.
Essayer de "resister" autrement au lieu de hair sterilement le bourgeois (Hair du vide...).
C'est une sacrée montagne a escalader.
Écrit par : JÖ | 05/01/2015
Ah bon, il n'y a pas de lutte des classes. Pas de concentration du capital d'un côté et paupérisation de l'autre. La vision suivante de la société me paraît plus réaliste que les explications pseudo-évoliennes sur la domination de la race spirituelle :
http://fortune.fdesouche.com/286499-la-lutte-des-classes-revisitee
Écrit par : Sven | 05/01/2015
"Ah bon, il n'y a pas de lutte des classes."
Si mais ca n'a rien de nouveau, ca n'explique pas tout.
Et est-ce que la "lutte des classes" suffit a une "revolution" ?
Écrit par : JÖ | 05/01/2015
Je me référais à une race spirituelle judéochrétienne, formée par deux millénaires de ladite civilisation (ou 'civilisation' : les guillemets lui vont très bien), opposée à ce qui reste timidement de la race spirituelle européenne, celle-ci étant destinée à disparaître.
Théorie farfelue ? Elle rend compte, en tout cas, de la parfaite et totale imperméabilité de nos idées parmi une vaste majorité de nos cons-citoyens, et elle rend compte aussi de la facilité avec laquelle l'Amérique et la Grande-Bretagne lèvent de véritables légions de valets à leur service, en particulier dans certains pays comme la Pologne. Cas récent, l'Ukraine : un cas d'école; ne pas oublier que Svoboda & Cie se réclament chrétiens. La description du type raciologique chrétien n'a pas encore été faite. C'est une sérieuse lacune.
Écrit par : Oscar | 05/01/2015
La question c'est l'universalisme...La facon dont il s'est retourné contre l'Europe.
Écrit par : JÖ | 06/01/2015
@JÖ et Oscar
Vous pensez que le soulèvement, s'il doit avoir lieu, se fera plus sur des questions géopolitiques et identitaires assez abstraites et lointaines pour la majorité de la population, ou autour d'une lutte contre les parasites d'en haut et d'en bas?
Écrit par : Sven | 07/01/2015
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