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15/09/2009

Inglorious propaganda

Lviv-Nkvd-pacte.jpgIl est vrai que les communistes avaient beaucoup à se faire pardonner. Le passage de la collaboration entre les deux totalitarismes (pactes Germano-soviétiques) à la lutte anti-fasciste après l’invasion, en juin 1941, de l’Union Soviétique, requerrait une bonne souplesse dialectique ainsi qu’une praxis à géométrie variable…Le parti communiste, interdit en France par Daladier en 1939, perdit durant l’été 41 nombre de sympathisants, déroutés et dégoûtés par le revirement –circonstanciel- du petit père des peuples.

Il est difficile ces jours-ci d’échapper à la vague médiatique qui accompagne le dernier film de Guédiguian « L’armée du crime », relatant de façon romancée l’histoire d’un groupe de résistants communistes étrangers, les FTP-MOI (francs tireurs et partisans, Main d’œuvre immigrée) –le groupe Manouchian en particulier- composé pour l’essentiel d’immigrés européens communistes, espagnols des brigades internationales, italiens, hongrois, arméniens, roumains, dont de nombreux juifs.

En passant, il est intéressant, même éclairant, de comparer l’importance de la couverture médiatique de ce film et l’omerta quasi-totale qui s’est faite, de façon intentionnelle, autour du terrible Katyn d’andzrej Wajda. Il est vrai que ce dernier, relatant l’élimination physique systématique par les troupes soviétiques lors de leur entrée en Pologne, de milliers d’officiers Polonais, n’était pas pour plaire à l’intelligentsia germano pratine Française, encore largement philo communiste…

Loin de moi l’idée de minimiser l’engagement –souvent jusqu’à la mort, le courage physique et moral, qui caractérisa nombre de ces combattants. Les hommes, ne sont pas en cause, ici.

Pour autant, la vision idyllique présentée par Guédiguian de l’engagement dans la résistance de groupes communistes à partir de l’été 41 en France, relayée par le banc de hareng journalistique servile habituel, est choquante. Pour plusieurs raisons :

-les raisons de l’entrée en résistance des communistes en 1941 sont loin de toutes relever du patriotisme Français (du moins en ce qui concerne leurs dirigeants, notamment Maurice Thorez, déserteur de son unité combattante en octobre 1939 qui trouve refuge à Moscou et devient ministre de De Gaulle en 1945…)

« Le premier juillet 1941, Dimitrov, le chef du Komintern, leur [communistes Français] a donné une consigne : « Entrer en contact avec de Gaulle, noyauter les colonies ralliées et susciter en France, contre le gouvernement Pétain et Darlan, un mouvement qui doit déboucher sur la guerre civile. » (in Charles de Gaulle, Eric Roussel)

-nulle part n’est évoqué le double jeu de l’internationale communiste jusqu’en 1941, alliée des Nazis. Ni le plan concerté de partage de l’europe entre les deux totalitarismes, planifié dans les fameux pactes.

-au moment ou de petits groupes de communistes entrent en résistance à cette époque, il existe déjà sur le territoire national, et dans l'empire, plusieurs groupes de résistance actifs, notamment l’OCM (organisation civile et militaire) du colonel Heurteaux, l’ORA (Organisation de la Résistance Armée), l’Armée Secrète de Delestraint, les réseaux d’Henri Frenay (Combat), de Teitgen (Liberation), d’Estienne d’Orves , d’Emmanuel Astier de la Vigerie, de Pierre Levy (Franc tireur), etc. La résistance Française est une mosaïque d’hommes et de groupes Gaullistes, anti gaullistes, voire Pétainistes, avant d’être communistes. Or impression est donnée au spectateur que toute action de résistance débute avec les communistes –étrangers de surcroît- durant l’été 41. Faux, évidemment.

-au moment où ces groupes de combat sont formés, sous l’instigation du Komintern, partout en Europe, la stratégie des communistes n’est nullement de « libérer » de l’oppression nazie les pays européens, mais, par une tactique systématique de terreur (attentats, assassinats d’officiers allemands, représailles, centaines d’otages fusillés, etc) de mobiliser le maximum de troupes en europe occidentale afin de dégarnir le front est, d’une part, d’autre part, clairement, de préparer les conditions d’une insurrection armée et l’instauration de régimes communistes à la Libération, notamment en europe occidentale. Ce qui n’enlève bien sûr rien à l’engagement individuel des hommes et des femmes manipulés par l’internationale communiste.

-les MOI, groupes créés en 1924 sur ordre du Komintern, pour donner une structure d’accueil, d’encadrement et de lutte aux nombreux réfugiés « anti fascistes » qui commencent à affluer vers la France en provenance d’Italie, ou d’Europe centrale, sont essentiellement composés de communistes, souvent juifs. Les FTP sont eux crées en février 1942 en remplacement de l’OS (organisation secrète du parti communiste clandestin) et en mars 42 sont crées des unités FTP-MOI, disposant de cinq groupes de langues (Italien, Roumain, Hongrois, Arménien, Juif).

-en février 1944, la résistance armée est unifiée dans les Forces Françaises de l’Intérieur (FFI), au sein desquelles, les communistes conservent leur organisation propre (FTP) et leur pouvoir de subversion. A la libération, de Gaulle aura le plus grand mal (lire le C’était de Gaulle de Peyrefitte pour s’en convaincre) à empêcher que des départements entiers –notamment dans le Sud-ouest- ne tombent sous la coupe des communistes. D’où l’amnistie de Thorez, en pleine épuration, manière d’acheter la paix civile…

Guédiguian est un bon réalisateur et j’ai aimé quelques-uns de ces films. Son père arménien, sa vie, son engagement communiste –respectable- expliquent largement cette vision réductrice de la résistance Française durant l’occupation nazie. Nulle doute que ce film célébrant la résistance immigrée anti fasciste –versus une France autochtone collaboratrice massivement anti sémite et veule- trouve rapidement sa place au Panthéon des œuvres destinées à l’édification des masses.

Une nouvelle diffusion du Chagrin et de la pitié d’Ophuls ou de Shoah de Lanzmann saura enfoncer le clou…