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21/12/2013

épuration-pride et beauté du diable

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"CENTRAFRIQUE - Après le scandale du légionnaire à la tête de mort au Mali, l'armée française doit se pencher sur un nouveau dérapage d'un soldat en mission. BFMTV s'est procurée ce vendredi 20 décembre une photographie représentant un soldat de l'armée française en mission en Centrafrique et arborant sur son uniforme un patch aux références nazies explicites. Une "idéologie que nous condamnons sans équivoque", a confirmé au HuffPost le porte-parole des Armées qui indique que le soldat sera suspendu dès qu'il aura été identifié. Plus embarrassant encore, cette image faisait partie d'une série de neuf photos publiées sur la page Facebook officielle des opérations extérieures de l'armée. Elle a depuis été retirée, mais des internautes l'ont conservée. La photographie montre un jeune homme en gros plan, l'arme à la main, et arborant un macaron scratché sur la manche. Dessus, la devise SS "Meine Ehre heißt Treue" (Mon honneur s'appelle fidélité), visiblement cousue sur un écusson tenu par un velcro. Le terme RCA désigne la République Centrafricaine et le drapeau français y est frappé d'un énigmatique "32", a priori là encore cousu. BFMTV avance une hypothèse en faisant référence à la 32e division SS sans pour autant y apporter beaucoup de crédit. Il se pourrait aussi que 32 fasse référence à l'année 1932, date à laquelle la devise "Meine Ehre heißt Treue" fut systématiquement gravée sur les ceinturons des SS. Joint par Le HuffPost, le colonel Gilles Jaron, porte-parole de l'Etat-major des armées, confirme l'existence de cette photographie. "La photo a été postée l 19 décembre sur Facebook. Il est apparu ensuite que le soldat arborait un insigne d'épaule qui n'appartient pas à l'uniforme de l'armée française et véhiculant une idéologie que nous condamnons sans équivoque". Une enquête de commandement a été ordonnée par le Chef d'Etat major et elle sera diligentée en Centrafrique par le général de commandement de la force Sangaris. "Dès que ce soldat aura été identifié, il sera immédiatement suspendu", nous a précisé le colonel Jaron sans vouloir évoquer les éventuelles sanctions qu'encourt le militaire pris en faute." Le HuffPost- 20 12 13.

Si ça n'était pas tragique pour le jeune soldat qui va en faire les frais (et sans doute devoir quitter l'armée), ce fait divers inepte serait drôle et en tous cas ô combien symptomatique du délire contemporain consistant à traquer tous les symboles -réels ou fantasmés- fascistes* au nom d'une dénazification jamais accomplie totalement dans une Europe qui vit mourir ce mouvement historique en 1945 et à jouer les FFI en bois alors que tout feldgrau a disparu de nos contrées depuis belle lurette.

J'entends d'ici tous les Camus, les Boltanski et les BHL glapir l'urgence d'une nouvelle épuration générale, de l'armée à la maternelle, avec voyages obligatoires à Tréblinka pour nos forces armées (ou ce qu'il en reste) et lecture systématique de Wiesel ou Primo Lévi dés la petite section...

Il suffit pourtant de relire le très progressiste et indiscutable Hubert Beuve-Méry ou l'excellent Jean Cau (qui n'étaient pas des nazis, je précise à l'égard des jeunes lecteurs d'Hoplite) pour saisir la fascination sauvage que pouvaient produire ces uniformes et ces mouvements révolutionnaires dans une Europe infectée par le parlementarisme pseudo-démocratique et le pil-poul libéral...

« Il y a dans l'élite nazie de la jeunesse un dynamisme, un héroïsme et une largeur d'horizon qui ne peuvent être perdus sans appauvrissement pour l'Europe. » (Hubert Beuve-Méry, journaliste, fondateur du Monde et du Monde diplomatique et directeur des études à l'école des cadres d'Uriage, 1945) NRH 04/10.

« Je n'oublierai jamais le jeune tankiste SS qui beurrait calmement son pain du plat de la lame de son poignard. Il ne nous regardait même pas. Il flottait autour de lui une odeur de guerre. De drap en sueur, de cuir, d'huile et de graisse tiède. Et s'il nous avait offert des poignards, des uniformes à notre taille et s'il nous avait assis aux commandes de l'énorme jouet,  qu'eussions-nous fait de nos cahiers et de nos livres ? Un feu de joie, peut-être. Mais il était allemand comme est français, vingt ans plus tard, le parachutiste qui ne prête aucune attention aux enfants de ce village kabyle. Une fille s'est arrêtée pour regarder le SS à tête de mort. Il a levé les yeux, elle a baissé les siens et est partie toute droite et toute patriote. Il a souri en la suivant du regard. Est-ce que la fille ose penser qu'il est bien dommage et bien étrange que le mal soit si beau ? » (Jean Cau, Le meurtre d'un enfant, 1965) NRH 04/10.

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« C'est alors qu'ils étaient arrivés, précédés de leurs motocyclistes qui roulaient lentement, les bras écartés, le buste droit. C'était au moment du déjeuner ; de toutes les maisons, on jaillissait pour les voir. Ils chantaient une mélodie rauque, coupée de longues interruptions,  où l'on entendait plus que le craquement rythmé de leurs bottes, et qui n'évoquait nulle joie, nul triomphe, mais seulement cette volonté d'avancer, de poursuivre, de pousser toujours plus loin, broyant les obstacles, vers une terre inconnue et promise -cette même volonté qu'exprimaient le mouvement de leurs bottes (comme s'ils écrasaient à chaque pas quelque chose), leurs regards raidis vers l'horizon, leurs fronts de rêveurs butés. Ils passaient, ils passaient, sans s'arrêter, verts et noirs, et s'effaçaient dans le poudroiement de la route sans qu'un seul d'entre eux eut jeté un regard à la foule subjuguée qui tapissait les murs comme une haie d'honneur. "maman, je voudrais être allemand. » « Tais-toi, tu dis des bêtises ! » « Je voudrais tant être allemand, maman ! »

(Jean-rené Huguenin, La côte sauvage, 1965) NRH 04/10

* je reprends ici le terme générique de "fascisme" et la distinction que fait Ernst Nolte entre fascisme "normal" (Italien) et fascisme "radical" (national-socialiste) dans son ouvrage La guerre civile européenne 1917-1945.
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(le nouveau générique de BFM)