05/04/2007
Propagande "anti fasciste" sur Arte.
Grand moment de désinformation et de falsification historique hier soir sur Arte. Une émission, « L’Europe des fronts populaires », prétendait retracer l’histoire du mouvement « antifasciste » européen, à la veille de la seconde guerre mondiale.
Je tombais dessus par hasard, et la perspective de revoir quelques documents émouvants de cette période critique me retint, malgré la certitude de devoir subir la propagande progressiste habituelle…Et avec Arte, on n’est jamais déçu !
La démonstration était implacable : le camp du Bien , progressiste, c’est-à-dire socialo communiste, bénéficiant de l’aide désintéressée de l’URSS, dans une lutte à mort contre le Mal absolu, c’est-à-dire tout le reste (droite parlementaire classique, Action Française, Croix de feu, mouvements fascistes Européens) étiqueté « ligues factieuses fascistes » ; Un sommet de pensée manichéenne exploitant sans vergogne contre vérités historiques, amalgames et mauvaise foi stratosphérique.
Pas un mot sur l’influence déterminante du Komintern en Europe ou sur la servilité de tous les partis communistes d’Europe à l’égard du PCUS, pas une référence à l’instrumentalisation de cette fameuse « lutte anti fasciste » par une puissance totalitaire désireuse d’étendre la révolution bolchevique sur tout le continent. Que l’on présente les émeutes de février 1934 et ses quelques (malheureuses) victimes comme une menace de subversion fasciste du pouvoir républicain serait risible si le téléspectateur savait qu’au même moment six millions de femmes, d’hommes et d’enfants étaient victimes d’une famine organisée par les soviétiques en Ukraine, et qu’en Asturie, quelques malheureux mineurs misérables manipulés par l’ultra gauche Ibérique se faisaient massacrer par le très efficace (déjà) Francisco Franco.
Je passe sur le beau discours de Maurice Thorez, leader historique du PCF, alors totalement sous la coupe du PCUS, pérorant sur la résistance populaire à la menace fasciste, le même homme qui déserta en 1940 son unité combattante pour fuir à Moscou et revenir comme une fleur en 1944, en pleine épuration (10.000 personnes fusillées à la libération en deux ans versus 20.000 par les Allemands en quatre ans….) et devenir ministre d’état du général…Ca donne mieux que tout une idée de la puissance du PCF à cette époque. Mais ça, il ne fallait pas compter sur Arte pour nous le rappeler !
Un sommet fut atteint avec la guerre civile Espagnole et la légende dorée des brigades internationales versus l’Espagne Franquiste fasciste. Or il n’y a pas de bon côté dans une guerre civile, il n’y a qu’un même peuple qui se déchire ; comment peut-on en 2007 présenter cette tragédie de façon aussi binaire et manichéenne, sans rappeler que toute une Espagne de patriotes non moins sincères prit les armes contre la menace bien réelle d’une dictature bolchevique ? Franco n’était pas un fasciste. Franco était un militaire conservateur croyant, qui méprisait le matérialisme bolchevique et bourgeois, et qui s’appuya tantôt sur la Phalange de Primera (un véritable mouvement fasciste), tantôt sur l’armée, tantôt sur l’Eglise pour consolider son pouvoir. Présenter cette Espagne là comme fasciste dans sa globalité est une imposture.
Ne pas dire un mot de l’aide militaire massive et précoce des Soviétiques, ni de la prise en main des Brigades Internationales par le Komintern évoque soit une inculture dramatique, soit une volonté délibérée de tromper le spectateur.
Au delà de cette œuvre de propagande ordinaire au « Pays des Lumières ™ », je repensais à ce court dialogue entre Zeev Sternhell et René Rémond dans l’excellente émission de Finkielkraut sur France Kultur...(un autre bras de l’hydre propagandiste progressiste). (1)
Sternhell y défendait l’existence d’une tradition fasciste Française, arguant de la présence, à coté de la geste humaniste rationaliste et universaliste issue des Lumières, d’une tradition alternative reposant sur une vision organique de la société, vomissant les droits de l’homme, l’individualisme, l’hédonisme et l’égalité, et se définissant en termes historiques, culturels, raciaux et ethniques…incarnée en 2007 par le FN. Une vision quelque peu binaire que René Rémond réfute en niant l’existence d’une tradition fasciste Française et en dissociant une droite traditionaliste de mouvances fascistes inconstantes sans prise réelle sur la société. Manquerait à cette droite traditionaliste ce caractère révolutionnaire et cette philosophie politique qui fait de l’Etat un absolu, qui sont distinctifs du fascisme. Et Rémond de distinguer cette mouvance intellectuelle fasciste en France (Francisme, Georges Valois, Doriot, PPF), d’une droite réactionnaire (Maurrassienne), conservatrice, hostile aux idéaux des Lumières, et attachée à des valeurs de l’ancien régime, mais sans cette composante révolutionnaire, de subversion d’un ordre existant pour lui en substituer un autre, du mouvement fasciste.
Je pense qu’il serait aussi possible de distinguer une droite libérale (au sens philosophique et politique du terme, surtout), dans la lignée de Tocqueville, qui concilie des valeurs de l’ancien régime et certains des acquits des Lumières, sans lien aucun avec l’idéologie fasciste, bien qu’hostile à certains égards au matérialisme (qu’il soit communiste ou bourgeois).
Je termine avec françois Furet pour qui, « le fascisme est la solution enfin disponible aux impasses de l’idée contre-révolutionnaire ; il permet de récupérer le charme de la révolution au service d’une critique radicale des principes de 1789. » (2)
(1) Qu’est ce-que la France? Stock Panama 2007.
(2) Fascisme et communisme, Furet, Nolte. Pluriel, p.66.
21:35 | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : fascisme, communisme, propagande, arte, guerre d'espagne, brigades internationales, komintern
Commentaires
Je pense que c'est surtout dans la relation à l'Etat que les droites se distinguent les unes des autres. Raison pour laquelle le fascisme au sens strict est discrédité... et ne peut se survivre qu'au travers d'ordres élitistes...
Enfin du temps où il y avait des droites qui s'accordaient le droit de ne pas s'aligner systématiquement sur les options définies par la gauche...
Écrit par : IVANE | 10/04/2007
c'est vrai, la référence à l'état permet de distinguer différentes familles à droite, des royalistes aux bonapartistes en passant par les libéraux. Et l'état est bien sûr une composante clef du fascisme, avec des nuances: Mussolini fut déposé par le parti (qui se confondait avec l'état) et cela n'aurait jamais pu arriver à Hitler.
Écrit par : hoplite | 10/04/2007
Je découvre votre blog et j'apprécie. Bonne continuation.
Écrit par : Pharamond | 11/04/2007
merci pharamond!
Écrit par : hoplite | 14/04/2007
Pour en revenir à ARTE: la chaîne des bobos rédemptionnistes franco-allemands n'en est pas à sa première prise de position.
Fin 2006, au cours d'une diffusion d'une rétrospective sur la guerre civile espagnole: le ton est très partial, le gouvernement bourgeois d'avant-guerre conspué, Franco diabolisé, l'exécution de Primo de Riveira "justifiée", bref le ton est classique... Un commentaire sur les actes de barbarie rouge m'a bien percuté cependant au milieu de tout ces salmigondis: après avoir admis que la répression des 2 côtés était comparable quant aux effectifs touchés, la commentatrice lâche à titre d'excuse que les exactions nationalistes sont planifiées par le haut commandement alors que les exactions rouges sont guidées par un "juste" ressentiment populaire... et de citer les critères d'épuration établis par les rouges (un certain habillement, le port de lunettes, la taille de la maison, l'assiduité à la messe..) sans aucune honte.
Guernica est bien sûr récupéré (je rappelle que la Légion Condor visait le pont, même s'ils s'y sont pris comme des c...), les malheureuses brigades internationales se battent courageusement et sans haine bien que sous-équipées pendant que quelques dandys fanatiques qui-seront-plus-tard-des-grands-collabos-ça-s'invente-pas arrivent avec des caisses remplies de mitrailleuses ultramodernes qui serviront à "exterminer" la population civile.
Le reportage est clôturé par un rassemblement à Tolède (?) de nostalgiques et anciens combattants nationalistes, chantant "Cara al Sol" en brandissant le drapeau espagnol et quelques bras droits, avec notre brave commentatrice regrettant que la manif' se déroule sans que les antifas ne viennent casser la gueule à ces octo- et nonagénaires (eh oui petite bobo, la mentalité "Schande-betoniert" n'a pas encore pris racine en Espagne).
Écrit par : Un Fantôme | 01/07/2007
je ne puis qu'opiner, fantôme. bienvenue sur ce blog.
Écrit par : hoplite | 01/07/2007
En parlant de propagande..
Il y a un bon articel dans Le Monde sur le Lavage de Cerveaux en liberté..
http://laurentgrandsimon.hautetfort.com/archive/2007/08/25/le-lavage-de-cerveaux-en-liberte.html
Écrit par : lg | 31/08/2007
Excellent conseil, oui cet article est tout bonnement excellent, particulièrement pour les débutants. Ca fait du bien de vous lire !
Écrit par : cote | 07/04/2010
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