08/10/2008
Dans le mur ou l'enseignement de l'ignorance
Comprends pas cet enthousiasme laudateur invraisemblable autour de ce film documentaire « Entre les murs » du footeux pédagogue enflé Bégaudeau…
Ce film n’est pourtant que le constat du naufrage de l’EN.
C’est le silence des défaites qui aurait du se faire après la sortie de cet œuvre à charge.
Notamment dans le camp progressiste Bourdivin grand pourfendeur de la violence symbolique de l’enseignement frontal, de la transmission verticale du savoir et de l’autorité à l’école. Un constat d’échec, ni plus ni moins. Et c’est terrible. Une des dernières scènes du film met en scène une gamine de quatrième en pleurs qui avoue n’avoir rien appris durant son année scolaire. Là est la réalité, la seule. Le reste n’est que spectacle, fausse compassion d’adultes complaisants et incapables d’apprendre quoi que ce soit à des gamins intelligents et conscients de ne pas recevoir ce à quoi ils ont droit, délires pédagogistes à la Mérieu, dont il n’est pas question de nier la sincérité de l’engagement.
Mais tous ces modernes pédagogues constructo-déconstructivistes, adeptes de Bourdieu et de Freinet, se sont plantés et ont devant eux le champ de ruines éducatif promis au plus grand nombre de gamins, lorsqu’ils ne sont pas fils de profs et/ou fils de bourgeois éclairés.
Or, mis à part quelques réserves prudentes et attendues de SOS éducation, Brighelli et autres Michéa, le camp du Bien (Libémonde, Télérama, inrockuptibles, etc.) montre une joie manifeste à célébrer le visage de cette catastrophe…Dont la palme d’or à Cannes est la meilleure illustration. Si encore cette « récompense » était le prélude à une autocritique et une remise en cause de la doxa éducative actuelle faite d’égalitarisme, d’antiracisme, de vivre ensemble, de démagogie à faire vomir une blatte et de faux semblants éducationnels, de renoncement coupable, de nivellement par le bas, de prolétarisation des gamins et des professeurs…
Mais non, c’est un « grand film », une « œuvre sincère et attachante », un « pied de nez aux thuriféraires de l’école de Jules Ferry », etc, etc, etc, ad lib.
Finalement la seule question qui vaille est : pourquoi tous ces gens sincèrement préoccupés par l’éducation de leurs enfants et qui sont conscients de ce désastre, se font – au travers de la destruction méthodique de l’école- les plus fidèles serviteurs de cette société du spectacle et de la marchandise pour laquelle des enfants instruits et cultivés sont une menace évidente ?
22:20 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : bégaudeau pipo
Commentaires
Je ne connais pas la situation en éducation en France, mais au Québec nous sommes aussi victimes du délires des haut-fonctionnaires en éducation et de leurs continuelles réformes insipides et inefficaces.
Et c'est sans compter la négligence généralisée des parents à l'endroit de leurs enfants. Résultat: les profs doivent non seulement "instruire" les élèves/étudiants, mais aussi les "éduquer" ie leur apprendre à vivre en société.
Je croise des jeunes adultes et je suis souvent outré par leur mauvaise préparation. Bcp d'entre eux ont du potentiel mais c'est gâché par la connerie générale.
Excellent sujet. Ça me tente d'en parler dans mon blogue.
Écrit par : Inukshuk | 09/10/2008
le pire, Inukshuk, c'est ça: des enfants gâchés.
Par idéologie, veulerie, lâcheté d'élites politicardes carriéristes parfaitement conscientes du niveau dramatique de l'éducation nationale mais avant tout soucieuses de ne pas faire de vagues et de ne pas heurter quelques puissants syndicats d'enseignants qui affectent de lutter pour une école plus juste et efficace (en terme de formation intellectuelle), mais qui en sont les premiers fossoyeurs par des méthodes pédagogiques ineptes, un égalitarisme prof/élève incapacitant et surtout par un abaissement/ une prolétarisation du corps enseignant.
Par complaisance d'une société de consommation qui - en dehors de quelques filières élitistes nécessaires à la bonne marche des affaires- s'accommode parfaitement de générations de crétins incultes et endoctrinables à plaisir.
En croyant se battre contre un pseudo complot bourgeois/élitiste/patriarcal/clérical/réactionnaire, etc, qui n'existe plus depuis bien longtemps, les enseignants sont les premiers à livrer des gamins incultes et analphabètes privés de tous repères et de tout sens critique à une société marchande prompte à les récupérer (au nom bien sûr de la rebellion permanente contre "le système").
Ajoutons que ceux qui savent l'état de délabrement du système (politiciens, profs, journalistes, les élites intellectuelles globalement) sont les premiers à faire des pieds et des mains pour faire rentrer leur progéniture dans quelques ghetto culturel bien sélectif et rude tout en prônant mixité sociale, laxisme et égalitarisme pour les autres...Tartufe pas mort.
désespérant
Écrit par : hoplite | 09/10/2008
A priori, il faut plutôt chercher du côté de la psychologie la réponse à votre question : plus on a dépensé d'énergie dans la réalisation d'une tâche, moins on devient apte à accepter la critique négative, à ouvrir les yeux devant l'échec et à chercher une solution alternative.
Alors une fois révélé le désastre dont on est responsable, plutôt que de faire amende honorable, on préfère dire qu'il est joli.
Écrit par : Wilfried | 12/10/2008
@wilfried; suis d'accord; c'est un peu ce que je sous entendais par "Mérieu, dont il n’est pas question de nier la sincérité de l’engagement."
nier l'évidence, cette irrationalité fondamentale..
au fond ce que j'appelle "évidence" n'a sans doute pas la même signification pour tous. et sans doute nombre des émules de ce désastre éducatif sont-ils sans doute persuadés du bien fondé de leur démarche et du fait d'avoir à "protéger" leurs enfants d'un retour de l'ordre moral, autoritaire et patriarcal. voire clérical
l'homme psychologique de Lasch
Écrit par : hoplite | 13/10/2008
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