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07/10/2007

Des Lois et de la "désobéissance civile".

A midi, ce jour, j’écoutais, comme souvent, France Inter et ses émissions hallucinantes de parti pris et de propagande progressiste. Pourquoi alors ne pas écouter plutôt La flûte enchantée, pourrait-on me rétorquer ? Plusieurs raisons à cela. Parce que j’écoute aussi Die Zauberflöte, parce qu' il est toujours nécessaire de se familiariser avec la novlangue progressiste qui règne en maître sur nos média et parce qu’il m’est physiquement impossible d’écouter tout autre radio commerciale saturée de messages publicitaires toujours plus ahurissants de débilité (au sens propre).

Ce jour, donc, à la fin d’une émission de la mi journée présentée par une pintade enthousiaste formatée au politiquement correct, portant sur certains apports linguistiques (indéniables) de l’Arabe à nos belles langues romanes cet ersatz de journaliste termina l’émission par cette phrase merveilleuse de courage et d’engagement citoyen: « et les mots, contrairement aux hommes, ne peuvent pas être expulsés»

Il n’y a pas si longtemps, une telle assertion sur une chaîne du service public aurait suffit à mettre un terme ipso facto à la carrière inepte de cette pasionaria de la cause sans papieriste. Aujourd’hui, sous les flots continus de la propagande progressiste appellant à la désobéissance civile, c'est-à-dire à la simple transgression de la loi commune, un tel manquement au devoir de réserve de la part de journalistes du service public non seulement ne choque plus que quelques esprits encore lucides, dont votre serviteur, mais parait sans doute naturel au plus grand nombre.

A travers certains faits de société comme le combat pour la régularisation inconditionnelle des « sans-papiers » alias de simple délinquants, le refus, sinon de la culture, mais aussi de l’expérimentation des OGM par des organismes de recherche publics, le climat d’insurrection armée qui règne de façon chronique dans de nombreux ghettos Africains de notre territoire, on peut mesurer à quel point les notions de justice, d’injustice, et d’obéissance aux lois de la Cité ont subit un dévoiement profond.

Qu’il me soit permis de recourir encore une fois aux Anciens, notamment à Platon, pour illustrer le sens originel de ces concepts, autrefois vivants et chargés de sens, aujourd’hui de simples coquilles vides dans la bouche de politiciens veules et surtout incultes.

Dans son Criton, Platon relate les derniers moments de Socrate, alors condamné à mort par ses pairs pour apostasie et corruption de la jeunesse. Son ami Criton, bien décidé à lui éviter la ciguë par la fuite et l’exil, mène avec son maître une réflexion philosophique sur les notions de justice et d’injustice. Socrate, à l’issue d’un court dialogue, et faisant intervenir un troisième interlocuteur-les Lois-, démontre à son ami qu’il vaut mieux affronter la mort plutôt que de contrevenir aux lois de la cité et ainsi commettre l’injustice.

Pour les Grecs, dont la raison de vivre était que la vie ait un sens et non pas qu’elle soit agréable, l’alternative qui s’offrait à celui qui était en désaccord avec les Lois de la Cité était simple : l’exil ou bien convaincre ses pairs de la nécessité de changer ces dernières. Par contre, et c’est le sens de la réflexion de Socrate à quelques heures de son trépas, celui qui élevé dans le respect des Lois de la Cité, y contrevient doit subir le jugement de ses pairs et l’accepter pour ne pas commettre l’injustice.

 

 

Socrate : « Eh bien, considère la chose sous le jour que voici. Suppose que, au moment ou nous allons nous évader d’ici, viennent se dresser devant nous les Lois et l’Etat, et qu’ils nous posent cette question : 

Les Lois : « Dis-moi, Socrate, qu’as-tu l’intention de faire ? Ce que tu entreprends de faire, est-ce autre chose que de tramer notre perte à nous, les Lois et l’Etat, autant qu’il est dans ton pouvoir ? Crois-tu vraiment qu’un Etat arrive à subsister et à ne pas chavirer, lorsque les jugements rendus y restent sans force, et que les particuliers se permettent d’en saper l’autorité et d’en tramer la perte ? (…)

Socrate : Que répliquons-nous à ce discours, Criton ? Les Lois ont-elles tort ou ont-elles raison ? 

Criton :  Pour ma part, je crois qu’elles ont raison

Les Lois : Considère donc, Socrate, si nous n’avons pas raison de dire qu’il est injuste d’entreprendre de nous traiter comme tu projettes de le faire. Nous qui t’avons mis au monde, nourri, instruit, nous qui vous avons, toi et les autres citoyens, fait bénéficier de la bonne organisation que nous étions en mesure d’assurer, nous proclamons pourtant, qu’il est possible à tout Athénien qui le souhaite, après qu’il a été mis en possession de ses droits civiques et qu’il a fait l’expérience de la vie publique et pris connaissance de nous, les Lois, de quitter la Cité, à supposer que nous ne lui plaisons pas, en emportant ce qui est à lui, et aller là ou il le souhaite. (…) Mais si quelqu’un de vous reste ici, expérience faite de la façon dont nous rendons la justice et dont nous administrons la Cité, celui-là, nous déclarons que désormais il est vraiment d’accord avec nous pour faire ce que nous pourrions lui ordonner de faire. Et nous affirmons que, s’il n’obéit pas, il est coupable à trois titres : parce qu’il se révolte contre nous qui l’avons mis au monde, parce que nous l’avons élevé, et enfin parce que, ayant convenu de nous obéir, il ne nous obéit pas sans même chercher à nous faire changer d’avis. » (Criton, 49e-50b)

 Les mots ne peuvent donc pas "être expulsés" car eux n'ont pas transgressé la loi. La véritable injustice est donc bien la désobéissance à la loi commune. Ceux qui sont en désaccord avec nos lois ont tous loisirs de s’exiler sous des cieux plus favorables (s’ils existent) ou bien d’essayer légalement, dans le respect des usages, de changer la loi.

Que des journalistes du service public ou des hommes en charges de l’autorité publique (maires parrainant des « sans papiers » ou préfets refusant d’exécuter les décisions de justice à l’égard de simples délinquants, enseignants manquants gravement au simple devoir de reserve) ne soient pas sanctionnés, que leur « résistance citoyenne » soit valorisée alors même qu’elle contrevient directement à nos lois, que nombre d’organisations subversives puissent imposer leur discours par la violence et la coercition, tout cela montre assez bien l’état de déliquescence de notre société.

Pour terminer sur une note d’espoir, dans la même émission « citoyenne », il était demandé à une petite fille de 11 ou 12 ans de nommer un aventurier ; in petto je pensais alors immédiatement à Marco Polo, Giotto, Reinhold Messner ou Thémistocle… Non! La petite fille répondit : « aujourd’hui l’aventure est sociale, l'aventurier, c'est Coluche et ses restos du coeur. » La relève est donc assurée.

Bon dimanche !

 

b2b80e75cf0fd1c2292b5cd0c0adf95c.jpg(La mort de Socrate, par David)