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11/03/2014

la gauche contre le socialisme


 

Dieu sait que Marchais n'a jamais figuré dans mon panthéon mais force est de reconnaitre que ce Marchais-là, et la gauche qui allait avec, c'est-à-dire (et au-delà du personnage de Marchais) une gauche enracinée dans les milieux populaires et ouvriers, dans des traditions, n'a plus plus strictement rien à voir avec la gauche d'aujourdhui (NPA, FDG, PC, PS confondus, tous ralliés à l'imaginaire de l'illimitation, de l'ouverture des frontières, de l'immigration de masse, du relativisme débridé, de l'ethno-masochisme (cf. la célèbre réplique de la salope Lauvergeon sur les "mâles blancs", débarquée d'Areva avec 1,5 million d’indemnités, plus d’un siècle de Smic...), bref de la globalisation marchande sous couvert de "lutte contre toutes les discriminations" et "d'ouverture au monde") ni avec les idiots utiles que le Spectacle met en avant quotidienement (du pauvre Besancenot au dérisoire Merluchon en passant par tous les cons-bandits du moment...).

Il faut revenir aux travaux récents du think tank Strausskahnien Terra-Nova sur la nécessité de substituer à l'électorat traditionnel de la gauche un "nouveau peuple de gauche"  (les femmes, les jeunes et les immigrés, ce nouveau prolétariat corvéable à merci et le mieux susceptible de détruire un peu plus toutes les barrières syndicales, légales, morales, traditionnelles à la toute-puissance du marché, plutôt que les FDS des classes populaires/moyennes encore scandaleusement ancrées dans des traditions, des usages et des pratiques "nauséabonds" qu'il est urgent de "dépoussierer" ou de "déconstruire" selon la sociologie d'Etat du triste Fassin), pour comprendre la métamorphose sidérante d'une "gauche" qui a minutieusement trahi tous les idéaux du socialisme originel d'un Orwell ou d'un Sorel (critique sociale, refus du salariat généralisé, enracinement dans une culture, des traditions, codes d'honneur, "bon sens" ou "décence commune" dont parlait Orwell, etc.) pour en constituer aujourdhui le principal ennemi (la "droite" libérale jouant encore sur quelques thèmes/marroniers traditionnels (religion, sécurité, morale, etc.) persuadée qu'elle est que seul son électorat y serait encore sensible, ce qui est faux mais il ne faut pas compter sur Coppé ou Guéant pour comprendre cela).

Il suffit, pour s'en convaincre, de réaliser qu'un homme comme DSK (archétype de la gauche kérozène et de l'affairisme globalisé) ait pu incarner l'espoir de la gauche pour la présidentielle 2012 pour comprendre le chemin parcouru par le "camp du Progrès" ou de voir qu'un "socialiste" comme Lamy puisse passer du bureau politique du PS Français à la direction de la trés mondialiste et libérale OMC sans coup férir...On est loin de Rousseau.

Le discours du trés stalinien marchais (en passant la prise de contrôle du PCF par un trostkyste comme Merluchon a du faire grincer quelques dents dans la mouvance communiste..) est intéressant à un autre titre: il montre qu'à cette époque déjà, il était de bon ton de faire passer l'électorat populaire pour un conglomérat de demi-crétins alcooliques, consanguins, fascistes/pétainistes/nauséabonds/crispés/frileux/racistes, bref des hasbeen, des Deschiens, des Bidochons, des personnages grotesques de Cabu; la gauche moderne, dans son ralliement à l'imaginaire juridico-marchand (sponsorisé par EuroRSCG et Carglass) de nos élites soixante-huitardes faisait ainsi le deuil de son électorat traditionnel, pas assez nomade ni encore assez étranger à lui-même et toujours suspect de rester fidèle à un weltgeist par trop traditionnel, empreint de décence commune et de méfiance à l'égard du monde festif, bariolé et frelaté vendus par nos happyfews de "droite" comme de "gauche" du site France.

Happyfews blindés et donneurs de leçons, constitués en une hyperclasse cosmopolite et parisienne endogamique arrogante et toute-puissante, au discours de bois reconnaissable à mille miles (avec ses mots-clefs vomitifs tels "diversité", "métissage", "vivre-ensemble", "ouverture", "déconstruire", "résister", "nauséabond", "refus des extrêmes", etc.), aux pratiques se situant le plus souvent aux antipodes des vertueux principes qu'ils prônent (voir l'affairisme stratosphérique de la clique Sarko (affaire Karachi, affaire de la campagne Balladur, affaire Clearstream, affaire du financement de la campagne 2007 du même, affaire Bettancourt, affaire Lagarde/Tapie, affaire de l'espionnage de journalistes (Courroye), etc.), squattant les 5/6/7/8 et 16° arrondissement (quand ça n'est pas la Suisse ou LA) c'est-à-dire bien bien loin des réalités quotidiennes de leurs "compatriotes" (ces enculés n'ont pas de patrie, ce sont des crevures hors-sol à tablettes et à latter d'urgence) qu'ils méprisent tant. A cet égard, la récente sortie du courageux NDA lors du grand journal de C+ est symptomatique de la montée d'une détestation de ces pseudo-élites fleurant bon sa réunion des états-généraux...A quand sarko-l'américain devant une cour de justice? A quand les cuistres du "grand journal" (et l'horrible Massenet et ses 25 000 euros mensuels!) virés voire lynchés par leurs créatures golémiques (des "sans-papiers" "précaires" "sans domicile" et "sans scrupules")? mais je m'égare..

La parole aux "élites"...

« On connaît la description par Jacques Attali de cette magnifique hyperclasse promise à la domination du nouveau monde sans frontières : « Ils ne posséderont ni entreprises ni terres, ni charges. Riches d’un actif nomade, ils l’utiliseront de façon nomade, pour eux-mêmes, mobilisant promptement du capital et des compétences en des ensembles changeants, pour des finalités éphémères dans lesquelles l’Etat n’aura pas de rôle. Ils n’aspireront pas à diriger les affaires publiques (la célébrité politique sera pour eux une malédiction). Ils aimeront créer, jouir, bouger. Connectés, informés, en réseau, ils ne se préoccuperont pas de léguer fortune ou pouvoir à leurs rares enfants : seulement une éducation. Riches de surcroît, ils vivront luxueusement en nomades de luxe, souvent sans payer ce qu’ils consomment. Ils porteront le meilleur et le pire d’une société volatile, insouciante égoïste et hédoniste, partagés entre le rêve et la violence. L’hyperclasse regroupera plusieurs dizaines de millions d’individus. Ils seront attachés à la liberté, aux droits des citoyens, à l’économie de marché, au libéralisme, à l’esprit démocratique. Ils voteront, créeront des associations de consommateurs, cultiveront et développeront une conscience aiguë des enjeux planétaires ; à terme ils s’intéresseront plus à la condition humaine qu’à l’avenir de leur propre progéniture. » (…)

« Il y a deux types de communautés, déclarait Bernard-Henri Lévy au Quotidien de Paris (16 janvier 1981). Les communautés de fait, d'abord. C'est-à-dire de « race », de »terre », de « terroir », de « région », de nation, que sais-je encore, toutes ces communautés incarnées (...) dont l'horizon me parait toujours être l'enfermement, la violence et finalement la barbarie. Et puis il y a les autres. Les communautés de verbe, de loi, de papier, d'idée, d'idéal. Des communautés sans ancrage, des rassemblements sans frontières, des identités cosmopolites et toujours transgressives ».

La parole au maître...

« Comme je l’écrivais dans Impasse Adam Smith, une vie moderne accomplie (c’est-à-dire conforme aux critères du capitalisme développé), doit, en toute logique, se réduire à une série de ruptures et de déménagements (dans la logique de Laurence Parisot, on dira que tout est précaire). C’est ce qui explique que le « migrant » soit progressivement devenu la figure rédemptrice centrale de toutes les constructions idéologiques de la nouvelle gauche libérale. Et ce, au lieu et place de l’archaïque prolétaire, toujours suspect de ne pas être assez indifférent à sa communauté d’origine, ou, à plus forte raison,  du paysan que son lien constitutif à la terre destinait à devenir la figure la plus méprisée –et la plus moquée- de la culture capitaliste (les ploucs, les bouseux, les pequenods, les culs-terreux, les terroni, etc.). Sur le processus historique (dont Canal Plus est le symbole accompli) qui a ainsi conduit –en quelques décennies- à refouler le souvenir des luttes des ouvriers de Lip et des paysans du Larzac au profit de celles des clandestins de l’église Saint Bernard (et sur l’étrange pacte entre l’univers « associatif » et le monde du show-biz et des médias noué à cette occasion), on trouvera des aperçus particulièrement éclairants dans l’ouvrage de Thierry Blin, L’invention des sans-papiers (PUF, 2010). » Michéa, Le complexe d'Orphée, 2011.

27/01/2009

Pansy left

PS : le casse-tête du 29 janvier

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Casse-tête diplomatico-syndical pour le PS. Aux yeux de Martine Aubry, la journée du 29 janvier doit marquer le grand retour du parti dans les manifestations. Mais, traditionnellement, les syndicats n'acceptent pas la présence de politiques dans le carré de tête des défilés, même si tous se réjouissent de recevoir le soutien du parti. D'où la question qu'on se pose au PS : faut-il défiler au milieu des anonymes ? Depuis quelques jours, les coups de téléphone se multiplient entre Solférino et les centrales syndicales pour négocier la place qu'occupera le parti. Lundi soir, on semblait se diriger vers la solution suivante : sur le parcours du cortège (Bastille-République), au niveau du Cirque d'hiver, les leaders PS salueraient les manifestants mais s'abstiendraient de défiler avec eux.

OH OH OH !

Ce qui est admirable avec nos socialistes progressistes c’est qu’ils ne ratent jamais de nous donner une occasion supplémentaire de les mépriser.

Après tout, pourquoi s’interroger sur la crise économique et sur les réponses adoptées par les gouvernements européens, pourquoi s’interroger sur la globalisation ou sur la validité du dogme progressiste ou de celle de la doxa productiviste et consumériste que se hâtent d’adopter les pays émergents? Pourquoi s’arrêter sur la contradiction fondamentale entre développement ou relance de la consommation et protection de l’environnement ? Comment comprendre ce terme de « développement durable », oxymore aussi réjouissant que ces sinistres « fonds éthiques » dont on ne parle plus guère bizarrement ???

C’est vrai, il y a tellement plus important à faire et à penser : « faut-il défiler au milieu des anonymes ? », là est la véritable question du jour, rue de Solferino….Comment « négocier la place qu’occupera le parti au milieu du cortège ? »…Faut-il saluer les manifestants sans défiler avec eux ? AH AH AH! bande de clowns invertébrés!

C’est sans doute à ce genre de considérations extraordinaires que l’on peut mesurer la vacuité de la pensée politique de feu le socialisme Français.

Comment ne pas évoquer Orwell et son socialisme « tory », sa common decency des gens ordinaires, aux antipodes de ces considérations émétiques d’une intelligentsia progressiste embourgeoisée sectaire et méprisant tout enracinement du politique dans le peuple et les traditions ouvrières au profit d’une cuisine d’appareil irréelle et déconnectée de la vie de millions de gens ?

La décence, c’est ça. Ce qui manque cruellement à cette nouvelle classe politique inculte et vulgaire. La common decency d'Orwell répond à l’indécence extraordinaire de l’intelligentsia progressiste. Au fond, l’axe du socialisme selon Orwell c’était ça : une solidarité avec les valeurs de la classe et de la culture populaire. Qu’illustrait Orwell avec ses biquettes, son engagement et son courage physique, son jardin et son comportement respectueux et digne. Que n’illustrent plus, et depuis belle lurette, les socialistes dont l’archétype reste le cuistre Julien Dray et sa bimbeloterie de parvenu…Orwell avait une expression très imagée pour désigner cette gauche qui n’en est plus et qui a trahi cette culture populaire : the pansy left , la gauche tapette…on ne saurait mieux dire.

La gauche non révolutionnaire –dite progressiste- qui s’est ralliée à l’internationalisme marchand appelé globalisation n’a plus rien à proposer aux peuples européens. Et son discours moralisant de chaisière, droit de l’hommiste et antiraciste ou diversitophile, ne masque plus guère le vide de sa pensée politique et sa dérive idéologique.

RIP.

 

« On a parfois l’impression que les simples mots de socialisme ou communisme ont en eux une vertu magnétique qui attire irrésistiblement tous les buveurs de jus de fruits, nudistes, porteurs de sandales, obsédés sexuels, Quakers, adeptes de la vie saine, pacifistes et féministes que compte l’Angleterre. Cet été, alors que je me déplaçais dans la région de Letchworth, je vis monter dans mon autocar deux vieillards à l’air épouvantable. Ils avaient tous les deux la soixantaine, tout petit, roses, grassouillets, et allaient tête nue. L’un arborait une calvitie obscène, l’autre avait de longs cheveux gris coiffés à la Lloyd George. Ils portaient tous deux une chemise de couleur pistache et un short kaki moulant si étroitement leurs énormes fesses qu’on discernait chaque repli de la peau. Leur apparition dans l’autocar provoqua une sorte de malaise horrifié parmi les passagers. Mon voisin immédiat, le type même du voyageur de commerce, coula un regard vers moi, détailla les deux phénomènes, se tourna à nouveau vers moi et murmura « des socialistes », du ton dont il aurait dit par exemple : « des Peaux-Rouges ». Il avait sans doute deviné juste – le parti travailliste indépendant tenait son école d’été à Letchworth. Mais l’important est que, pour ce brave homme, excentrique était synonyme de socialiste, et réciproquement. »

 

Georges Orwell, Le quai de Wigan, p.196-197.