26/02/2008
L’affaire Fleury ou le regard hémiplégique du milieu enseignant.
Des étudiants de l'université de Poitiers, soutenus par la présidence, par des enseignants et des élus locaux, se mobilisent pour refuser l'affectation d'un professeur, Benoît Fleury, en raison de son passé au sein du mouvement d'extrême droite GUD (Groupe union droit). Une pétition a été lancée et a recueilli plus de 250 signatures, dont celles de trois députés socialistes de la Vienne et du doyen de l'UFR de sciences humaines et arts. Reçu major à l'agrégation d'histoire du droit, M. Fleury a pu choisir l'université où il voulait enseigner et son choix s'est porté sur Poitiers. Selon le président de l'université, Jean-Pierre Gesson, "les affectations ne posent pas de problème la plupart du temps", mais la venue de M. Fleury "est une source de trouble". Dans un communiqué publié lundi 25 février, le conseil d'administration de l'université "prend acte avec la plus vive inquiétude de l'éventuelle nomination de Benoît Fleury et regrette que la procédure d'affectation des agrégés du supérieur ne laisse aucun droit aux instances de l'université, ni à son président, de s'opposer au recrutement d'un ancien dirigeant d'un groupuscule violent d'extrême droite". Le conseil demande au président de la République de ne pas procéder à la nomination à Poitiers de M. Fleury. De leur côté, des étudiants de l'université ont annoncé leur intention de perturber ses cours s'il était nommé et de "lui rappeler à chaque fois son passé". M. Fleury a présidé le GUD de 1995 à 2000. "Il incarne, dit la pétition hostile à sa venue, une droite extrême et nauséabonde." Dans un entretien à L'Echo des Savanes paru en mars 1999, M. Fleury, surnommé "Lord", déclarait notamment : "Nous, partout où il peut y avoir de la baston, on y va." Il se réclamait du national-socialiste belge Léon Degrelle, et estimait qu'il "faut rayer de la carte Israël".
(Source : http://www.lemonde.fr/societe/article/2008/02/26/universi...)
Quel est le problème exactement ?
Que ce juriste brillant ait eu un engagement politique militant à l’extrême droite et non à l’extrême gauche ou simplement à gauche…
Quel rapport avec sa compétence professionnelle et la qualité de son enseignement de l’histoire du droit ? Aucune…
Que les choses soient claires : je ne prends pas ici la défense de cet homme que je ne connais pas et dont les opinions antisémites et l’apologie du national-socialisme, si elles sont avérées, me répugnent.
Ce qui m’insupporte dans cette affaire, c’est la tartuferie habituelle des milieux enseignants, qui sous le masque de la tolérance et de la vertu se montrent les plus sectaires qui soient.
Cette affaire en rappelle une autre : l’affaire Boudarel. Cet enseignant catholique Français et marxiste en poste à Sai¨gon, qui déserte l’armée Française pendant la guerre d’Indochine, trahit son pays en devenant commissaire politique d’un camp de prisonnier Français, le camp 113, ou les conditions de détention, la torture physique et psychologique, et la mortalité sont dramatiques. Boudarel est chargé de la rééducation politique de ses compatriotes, à la différence des camps nazis ou du goulag soviétique ou les détenus n’avaient pas à subir ce lavage de cerveau. Inculpé de trahison, Boudarel est condamné à mort par contumace en juin 1953. En 1970, après la loi d’amnistie couvrant les crimes commis en Algérie ou enn Indochine, votée par les communistes et les Gaullistes, Boudarel rentre en France, intégre le CNRS et l’Université de Paris VII comme maître-assistant d’histoire, spécialiste du Viêt-Nam…En 1991 éclate l’affaire Boudarel lorsque celui-ci est reconnu et dénoncé publiquement, lors d’un colloque organisé au Sénat, par un ancien détenu du Vietminh Jean-jacques Beucler, alors secrétaire d'État aux Anciens combattants. Une association d’anciens combattants et anciens prisonniers/ rescapés du camp 113 essaie alors de faire condamner cet homme pour crime contre l’humanité, les crimes de guerre étant amnistiés. Ils sont déboutés en 1993 par la cour de cassation qui fait valoir que seuls les crimes nazis relèvent de crimes contre l’humanité…
Ou encore l'affaire Pascal Salin: comment un économiste libéral de renom nommé à la tête du jury d'agrégation d'économie 2004 a du afronter une fronde des milieux enseignants, SNESUP en tête et autres syndicats d'extrême gauche, relayés par les commissaires politiques (illustration ci-dessous de Thomas Piketty en grand uniforme) de Libération, du Monde et de France culture... Pourquoi un tel scandale?Parceque depuis des lustres, ce même jury d'agrégation était trusté par des économistes au mieux Keynésiens au pire marxistes, sans que cela trouble le moins du monde nos belles âmes vigilantes...Ou le sectarisme ordinaire du camp progressiste maniant à la perfection la réduction ad Hitlerum, chère à Léo Strauss: libéral = fasciste. La vie est tellement simple quand on appartient au camp du Bien.
Plusieurs remarques.
-Boudarel, traître, déserteur et criminel, a donc pu enseigner pendant plus de vingt ans au sein de l’université Française sans que cela pose le moindre scrupule à la communauté enseignante. On comprend effectivement que la récupération par l'université Française, en tant qu'enseignant, d'un tortionnaire condamné à mort par contumace par la justice Française ne puisse pas "être cause de troubles" au sein du corps professoral et estudiantin...
-Contrairement à Fleury, il ne s’agit pas seulement dans l’affaire Boudarel d’engagement politique, d’idées, aussi condamnables soient-elles, mais de désertion devant l’ennemi, de trahison et de complicité de crime de guerre ou de crimes contre l’humanité, excusez du peu ! A-t-on entendu à cette époque la moindre réticence de la communauté enseignante ? Non. Pourquoi ?
-Faire le procès de Boudarel, c’eut été instruire le procès du communisme, cet autre totalitarisme, coupable de plus de cent millions de mort durant le XXIème siècle, la plus vaste entreprise de terreur organisée, d’esclavage et de misère de masse. C’eut été se poser la question de la complaisance coupable de ces milieux enseignants qui hurlent à l’ogre fasciste dés qu’un enseignant promu ne fait pas partie du sérail collectiviste, mais qui ne voient pas ou ne dénonce pas l’engagement radical, totalitaire, à gauche d'une majorité du corps enseignant Français…C’eut été faire le procès de toute une intelligentsia complaisante à l’égard du communisme et que dénonçait Aron dans L’opium des intellectuels.
20:02 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : communisme, nazisme, fleury, boudarel, totalitaire, tartufe, marxiste
10/12/2006
Boudarel, l’honneur de Jospin et le déshonneur de l’université Française.
Tout récemment, un ami qui eut le triste privilège de réchapper des camps de la mort du Viet minh, pendant la guerre d’Indochine, après y avoir survécu 3 ans dans des conditions atroces, me remémora la réaction courageuse et isolée de Jospin lors de l’affaire Boudarel.
Durant la guerre d’Indochine, ce militant communiste et enseignant à Saigon, passé du coté du vietminh en 1950, devint notamment le commissaire politique du camp 113 en 1953. Durant son année de « fonction », sur 320 prisonniers Français, ses compatriotes, 278 vont mourir de mauvais traitements et de torture physique et psychologique. Inculpé de trahison Georges Boudarel est condamné à mort par contumace en juin 1953.
Après les accords de Genève, Georges Boudarel de retour en France en 1966 après avoir bénéficié de la loi d'amnistie du 18 juin 1966, sera coopté au CNRS par ses amis communistes pour y préparer une thèse de troisième cycle d’histoire à l’université Paris VII Jussieu. Il devient maître de conférences à Jussieu et ses mêmes amis feront ensuite valider ses années « d’expérience » en Indochine pour favoriser sa carrière…
Le 13 février 1991, lors d'un colloque au Sénat sur le Vietnam auquel Boudarel participe, il est apostrophé par Jean-Jacques Beucler (président du Comité d'entente des anciens d'Indochine, ancien secrétaire d'État à la défense puis aux anciens combattants de 1977 à 1978, ancien officier et prisonnier du camp N° 1 au Tonkin) qui, au nom d'anciens prisonniers, exprime « son plus profond mépris » à l'historien. « Vous avez du sang sur les mains. Votre présence à cette tribune est indécente ».
Contre toute attente, articles et pétitions en faveur de Boudarel ne manquèrent pas dans le camp « progressiste » (Jean Lacouture, Pierre Vidal-Naquet, etc) et la justice rejeta l ‘accusation de crime contre l’humanité portée par une association d’anciens combattants, au motif que les faits étaient couverts par la loi d’amnistie de 1966.
Seul ou presque à gauche, Lionel Jospin, alors ministre de l’EN, sauva l’honneur de son camp en déclarant que « si le choix de l’anticolonialiste était juste », il ne lui paraissait « pas indispensable pour autant de passer du coté de l’adversaire de notre pays, quoi qu’on en pense ». Jospin ajouta que « rien ne peut justifier qu’un intellectuel, qu’un professeur devienne un kapo dans un camp de prisonnier, dans un camp de concentration dans lequel ses propres compatriotes mouraient sous la torture et les mauvais traitements. Cet homme la ne mérite pas à mon sens de comité de soutien ».
Il est sans doute intéressant de constater qu’à la même époque un jeune chercheur nommé Reynald Secher, auteur d’une thèse iconoclaste sur les guerres Vendéennes (Le génocide franco-français), vit sa carrière détruite par le même milieu universitaire endogamique, dont les efficaces méthodes Staliniennes perdurent depuis l'aprés guerre .
20:45 | Lien permanent | Commentaires (34) | Tags : boudarel, indochine, jospin, université, staliniennes