29/10/2016
un ordre parfait
"On se cherche des retraites à la campagne. Et toi-même, tu as coutume de désirer ardemment ces lieux d'isolement. Mais tout cela est de la plus vulgaire opinion puisque tu peux, à l'heure que tu veux, te retirer en toi-même. Nulle part en effet, l'homme ne trouve de plus tranquille et de plus calme retraite que dans son âme, surtout s'il possède, dans son for intérieur, ces notions sur lesquelles il suffit de se pencher pour acquérir aussitôt une quiétude absolue, et par quiétude, je n'entends rien autre qu'un ordre parfait.
(...) Il reste donc à te souvenir de la retraite que tu peux trouver dans ce petit champ de ton âme. Et, avant tout, ne te tourmente pas, ne te raidis pas; mais soit libre et regarde les choses en être viril, en homme, en citoyen, en mortel. Au nombre des plus proches maximes sur lesquelles tu te pencheras, compte ces deux: l'une, que les choses n'atteignent point l'âme, mais qu'elles restent confinées au dehors, et que les troubles ne naissent que de la seule opinion qu'elle s'en fait. L'autre, que toutes ces choses que tu vois seront, dans la mesure où elles ne le sont point encore, transformées et ne seront plus. Et de combien de choses les transformations t'ont déjà eu pour témoin! Songes-y constamment: le monde est changement, la vie remplacement."
Marc-aurèle (121-180 ap JC), Pensées pour moi-même.
"Quand j’étais gamin, petit Parisien élevé au gaz d’éclairage et au temps des restrictions, mon père m’avait envoyé prendre l’air à la campagne, aux soins d’un vieux couple. Lui était jardinier, il bricolait çà et là, entre les plants de carottes et les rangs de bégonias. Le bonhomme était doux et tendre, même avec ses ennemies les limaces. Devant sa femme, jamais il n’ouvrait la bouche, à croire qu’elle lui avait coupé la langue et peut-être autre chose. Il n’avait même pas droit aux copains c’est-à-dire au bistrot. J’étais son confident, le seul, je crois, qui eut jamais ouvert le cœur à sa chanson. Il me racontait le temps lointain quand il avait été un homme. Cela avait duré quatre années terribles et prodigieuses, de 1914 à 1918. Il était peut-être un peu simple d’esprit mais son œil était affûté et son bras ne tremblait pas. Un officier avait repéré les aptitudes du bougre et fait de lui un tireur d’élite, un privilégié. Armé de son Lebel, li cartonnait ceux d’en face avec ardeur et précision, sans haine ni remords. Libre de sa cible et de son temps, exempté de la plupart des corvées, il était devenu un personnage. Il tirait les porteurs d’épaulettes et de galons en feldgrau. Il me cita des chiffres incroyables qui avaient sans doute gonflé dans sa petite tête radoteuse en trente ans de remachouillis solitaires. Avec lui j’ai découvert cette vérité énorme que la vie d’un homme, ce ne sont pas les années misérables qui se traînent du berceau à la tombe, mais quelques rares éclairs fulgurants ; Les seuls qui méritent le nom de vie. Ceux que l’on doit à la guerre, l’amour, l’aventure, l’extase mystique ou la création. A lui, la guerre, généreusement, avait accordé quatre ans de vie. Privilège exorbitant au regard de tous les bipèdes mis au tombeau sans jamais avoir vécu. "
Dominique Venner, Le cœur rebelle. 1994.
20:20 | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : marc-aurèle, venner
16/11/2014
ce petit champ de ton âme
"On se cherche des retraites à la campagne. Et toi-même, tu as coutume de désirer ardemment ces lieux d'isolement. Mais tout cela est de la plus vulgaire opinion puisque tu peux, à l'heure que tu veux, te retirer en toi-même. Nulle part en effet, l'homme ne trouve de plus tranquille et de plus calme retraite que dans son âme, surtout s'il possède, dans son for intérieur, ces notions sur lesquelles il suffit de se pencher pour acquérir aussitôt une quiétude absolue, et par quiétude, je n'entends rien autre qu'un ordre parfait. (...) Il reste donc à te souvenir de la retraite que tu peux trouver dans ce petit champ de ton âme. Et, avant tout, ne te tourmente pas, ne te raidis pas; mais soit libre et regarde les choses en être viril, en homme, en citoyen, en mortel. Au nombre des plus proches maximes sur lesquelles tu te pencheras, compte ces deux: l'une, que les choses n'atteignent point l'âme, mais qu'elles restent confinées au dehors, et que les troubles ne naissent que de la seule opinion qu'elle s'en fait. L'autre, que toutes ces choses que tu vois seront, dans la mesure où elles ne le sont point encore, transformées et ne seront plus. Et de combien de choses les transformations t'ont déjà eu pour témoin! Songes-y constamment: le monde est changement, la vie remplacement."
« Considère, par exemple, les temps de Vespasien, tu y verras tout ceci : des gens qui se marient, élèvent des enfants, deviennent malades, meurent, font la guerre, célèbrent des fêtes, trafiquent, cultivent la terre, flattent se montrent arrogants, soupçonneux, conspirent, souhaitent que certains meurent, murmurent contre le présent, aiment thésaurisent, briguent les consulats, les souverains pouvoirs. Eh bien ! Toute la société de ces gens-là n'est plus ! Passe maintenant aux temps de Trajan : ce sont les mêmes occupations, et disparue aussi est cette société. Passe en outre en revue et semblablement les autres documents des temps et des nations entières, et vois combien d'hommes, après avoir tendu toutes leurs forces, sont tombés bien vite et se sont dissous dans les éléments. Surtout rappelle-toi ceux que tu as connus toi-même et qui, se tiraillant pour rien, négligeaient d'agir conformément à leur propre constitution, de s'y tenir et de s'en contenter. Mais il est nécessaire de se souvenir ici que le soin dont il faut entourer chaque action, doit avoir sa propre estimation et sa proportion. Car de cette façon, tu ne te décourageras point si tu n'as pas consacré aux choses inférieures plus de temps qu'il ne convenait. »
Marc-aurèle (121-180 ap JC), Pensées pour moi-même.
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"Quand j’étais gamin, petit Parisien élevé au gaz d’éclairage et au temps des restrictions, mon père m’avait envoyé prendre l’air à la campagne, aux soins d’un vieux couple. Lui était jardinier, il bricolait çà et là, entre les plants de carottes et les rangs de bégonias. Le bonhomme était doux et tendre, même avec ses ennemies les limaces. Devant sa femme, jamais il n’ouvrait la bouche, à croire qu’elle lui avait coupé la langue et peut-être autre chose. Il n’avait même pas droit aux copains c’est-à-dire au bistrot. J’étais son confident, le seul, je crois, qui eut jamais ouvert le cœur à sa chanson. Il me racontait le temps lointain quand il avait été un homme. Cela avait duré quatre années terribles et prodigieuses, de 1914 à 1918. Il était peut-être un peu simple d’esprit mais son œil était affûté et son bras ne tremblait pas. Un officier avait repéré les aptitudes du bougre et fait de lui un tireur d’élite, un privilégié. Armé de son Lebel, li cartonnait ceux d’en face avec ardeur et précision, sans haine ni remords. Libre de sa cible et de son temps, exempté de la plupart des corvées, il était devenu un personnage. Il tirait les porteurs d’épaulettes et de galons en feldgrau. Il me cita des chiffres incroyables qui avaient sans doute gonflé dans sa petite tête radoteuse en trente ans de remachouillis solitaires. Avec lui j’ai découvert cette vérité énorme que la vie d’un homme, ce ne sont pas les années misérables qui se traînent du berceau à la tombe, mais quelques rares éclairs fulgurants ; Les seuls qui méritent le nom de vie. Ceux que l’on doit à la guerre, l’amour, l’aventure, l’extase mystique ou la création. A lui, la guerre, généreusement, avait accordé quatre ans de vie. Privilège exorbitant au regard de tous les bipèdes mis au tombeau sans jamais avoir vécu. "
Dominique Venner, Le cœur rebelle. 1994.
18:36 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : marc-aurèle
13/08/2014
darkness
« Considère, par exemple, les temps de Vespasien, tu y verras tout ceci : des gens qui se marient, élèvent des enfants, deviennent malades, meurent, font la guerre, célèbrent des fêtes, trafiquent, cultivent la terre, flattent se montrent arrogants, soupçonneux, conspirent, souhaitent que certains meurent, murmurent contre le présent, aiment thésaurisent, briguent les consulats, les souverains pouvoirs. Eh bien ! Toute la société de ces gens-là n'est plus !
Passe maintenant aux temps de Trajan : ce sont les mêmes occupations, et disparue aussi est cette société. Passe en outre en revue et semblablement les autres documents des temps et des nations entières, et vois combien d'hommes, après avoir tendu toutes leurs forces, sont tombés bien vite et se sont dissous dans les éléments. Surtout rappelle-toi ceux que tu as connus toi-même et qui, se tiraillant pour rien, négligeaient d'agir conformément à leur propre constitution, de s'y tenir et de s'en contenter.
Mais il est nécessaire de se souvenir ici que le soin dont il faut entourer chaque action, doit avoir sa propre estimation et sa proportion. Car de cette façon, tu ne te décourageras point si tu n'as pas consacré aux choses inférieures plus de temps qu'il ne convenait. »
(Marc-Aurèle, Pensées pour moi-même)
Voila, le sens de la mesure. Se savoir fini et mortel. Discriminer les choses importantes des autres, inférieures.
La mesure. Ça me fait penser à Camus. Le philosophe de la révolte était aussi celui de la mesure, cette sagesse inadmissible dans une époque éprise de radicalité et d'oukases Sartriens.
Mesure ne veut pas dire tiédeur :
« En ce moment, on lance des bombes dans le tramway d'Alger. Ma mère peut se trouver dans un de ces tramways. Si c'est cela, la justice, je préfère ma mère. »
dit Camus à Stockholm. Comment dénier toute légitimité aux attentats aveugles, fussent-ils l'émanation d'une juste cause et soutenus par toute une intelligentsia progressiste germanopratine forcément émétique...
Il y a sept ans, une de mes vielles patientes mourante m'a offert ces Pensées pour moi-même de Marc-Aurèle, alors son livre de chevet que j'avais remarqué. Elle m'a offert autre chose : l'aveu d'une vie inavouable, d'un deuxième amour, d'un homme avec lequel elle avait vécu une autre vie, parallèle, sans mesure pourrait-on dire. Et pourtant, elle ne quitta pas son mari, ses enfants, que je rencontrais tous les jours auprès d'elle. Pourquoi m'avait-elle confié pareil secret ? Je crois qu'elle avait besoin de se confier, avant de mourir, et y avait que moi:D. Quelques mois plus tard, son mari, qui n'avait plus que quelques jours à vivre, m'écrivit une petite lettre émouvante au possible, alors que je venais de perdre un gamin. Quelques mots tremblés, ceux d'un vieillard qui se savait mourant mais qui tenait à m'assurer de son affliction. J'ai reçu sa lettre deux jours après sa mort. Elle m'émut jusqu'au sang et j'y repense la gorge serrée. Ça n'était pas des choses inférieures, je le savais même si toute mesure m'échappait à l'époque.
Un dimanche soir, quoi.
I see a red door and I want it painted black,
no colours anymore I want them ot turn black.
I see the girls walk by dressed in their summer clothes,
I have to turn my head until my darkness goes...
20:52 | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : marc-aurèle, camus
17/08/2012
retour aux vaches
Pas de panique, j’ai juste pris quelques jours de repos en phalange, loin de la foule et de la chaleur…comme chaque année, d’ailleurs.
Petite course matinale au pied du Charvet, seul et heureux, au milieu des torrents, des prairies d’alpages, des gentianes et des saponaires, des biquettes à cornes regardant en l’air et des clarines le museau en bas, sifflements des marmottes à mon approche, sommets déchiquetés accrochés par les nuages, souffrance physique modérée (rien de commun avec celle d’un Kröger dans son village oublié), petite pause sur un éperon rocheux au pied d’un buron (toujours le même) prés duquel je passe l’hiver à ski, le bruit en bas du torrent, la paix enfin. Pas vu mon berger avalin lecteur de Marc-Aurèle dont j’ai déjà parlé ici, ses vaches mais pas lui. Me rappelait un guide des Bossons que j’avais suivi quelques étés, jeune et beau, physiquement assez prés de l’Apollon du belvédère^^ et en lequel j’avais une confiance aveugle (à raison, j’avais 16 ans) : le genre de mec capable de me faire retrouver le sourire dans une paroi merdique et gazeuse sur une ou deux petites arrêtes rocheuses et « assuré » par un ou deux spits auto-bloqueurs qui ne me rassuraient qu’à moitié. Un jour on avait fait une voie facile partant de la vallée blanche et montant à l’aiguille du Midi (voie des Cosmiques pour les connaisseurs), facile mais impressionnante car exposée et débouchant sur la plate-forme d’arrivée du téléphérique (avec le spectacle habituel des touristes asiatiques qui te shootent à l’arrivée alors que tu fais une école d’escalade lambda…ça fait du bien à l’ego, ha ha). Bref, on avait fini par devenir potes et il m’avait invité à boire une mousse chez lui dans sa ferme aménagée (sorte de grange retapée avec du bois partout, des cordes d’escalade au plafond, des posters d’Alpirando avec Edlinger aux murs, un vieux frigo –genre frigidaire- rempli de packs de kro…une vie tranquille avec sa copine, une espèce de bombasse aux yeux verts et cheveux noirs, à mon avis experte dans toutes les techniques de verrouillage pelvien et que je ne quittais pas des yeux (au risque de souiller mon 501). Aucune chance de pouvoir se prévaloir d’une quelconque éthique de la virginité, celle-là. Ouais, ils étaient beaux tous les deux et devaient le savoir ; j’ai souvent remarqué que les gens beaux –et conscients de l’être- étaient gentils, un peu comme s’ils voulaient se faire pardonner cet excès de considération divine ? Mouais.
Revu Jeannette, ma voisine Corrézienne (qui vit passer les maudits de Das Reich en 44), dans sa ferme, au milieu de ses poules, de ses lapins et de son potager luxuriant : la même blouse bleu hors-d’âge reprisée mille fois, le visage tanné par le soleil et marqué de grosses rides, les mêmes verres Duralex, la même toile cirée fixée par des petits clous à la table, la même grosse boite de biscuits, les potins du canton, des nouvelles de son petit (mais terriblement efficace car simple) monde champêtre. Le genre de parenthèse hors du monde qui me permet de recentrer mon jugement et d’affronter le démon quotidiennement, et ses figures grimaçantes à la BHL. Toujours vivant l’apôtre! Et si terriblement nuisible.
« Constamment, comme je marche dans les rues, je ne peux m’empêcher de lever les yeux vers les fenêtres pour repérer celles dont on pourrait faire de bonds nids de mitrailleuses. »
G Orwell cité par Simon Leys (Le studio de l’inutilité, 2012)
Cher, cher Eric Blair, je pensais être le seul à me faire régulièrement ce genre de réflexion (quitte à m’interroger sur ma santé mentale, entouré que je suis de festivus progressistes persuadés de ne point avoir d’ennemis, dès lors qu’ils ne s’en désignent pas -comme le dit si bien Freund- et consternés de me voir de temps à autres nettoyer consciencieusement mes armes ou aller au stand de tir), et bien non. Bon, le Londres des années 40 (où la perspective d’une invasion allemande était bien réelle) n’est pas la France de François Normal mais ce genre de préoccupation singulière me parait bien naturelle dès lors que l’on ne perd pas de vue cet horizon de la guerre (dont parle Venner) que seuls les occidentaux ont oublié, au moins depuis 45.
Le bruit des cloches et des torrents ne m’empêche pas d’entendre la petite musique habituelle des guerres impériales servilement relayée par la diplomatie française et ses sayanims fidèles (BHV ou Fabius (dont le patronyme fut emprunté à un général romain par un de ses ancêtres), par exemple mais pas seulement). Serbie, Irak, Kosovo, Libye, Afghanistan, maintenant la Syrie, sans doute demain l’Iran : derrière la propagande en forme de « protection des populations civiles » ou de « promotion des droits de l’homme » ou de la « démocratie » s’avancent sans trop se cacher les VRP d’Halliburton et les mercenaires de Blackwater…toujours le même scénario et la même volonté inflexible de garder l'hegemon. Ordo ab chaos?
A suivre.
19:57 | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : obama, bhl, vaches, orwell, marc-aurèle
29/05/2011
memento mori
Passé quelques jours près de l’ancienne Aquiléria (aujourd’hui Eygalières), petit village des Alpilles niché sur un éperon rocheux et qui doit son nom au fait que les romains y puisaient l’eau qui alimentait Arles. Contraste assez marquant d’ailleurs, entre cette eau que l’on voit peu (hormis quelques canaux d’irrigation) et l’aridité apparente des champs d’oliviers aux herbes sèches. Des paysages magnifiques faits de rangées d’oliviers, d’amandiers, quelques vignes à l’ombre des replis rocheux, ces barres calcaires déchiquetées des Alpilles qui ont éveillé en moi le souvenir des paysages décrits par Pagnol. Des mas partout orientés Nord-Sud (pour s’abriter du Mistral), aux petites ouvertures laissant passer la lumière mais non la chaleur ; des cyprès au nord et à l’est, pour couper les vents dominants, des platanes et des micocouliers sur le versant méridional des habitations, pour rafraîchir la façade et les hommes.
En sortant d’Aquiléria, sur la route d’Orgon, une petite chapelle dite Saint-Sixte, sur un petit tertre rocailleux et située à l’emplacement d’un temple païen dédié aux eaux. Je gare ma camionnette sous un panneau me disant de ne rien laisser dans mon véhicule. Le genre d’endroit où le voyageur attentif peut saisir à chaque instant des vestiges d’époques et de civilisations aujourd’hui disparues : des Celto-Ligures aux Francs en passant par les Etrusques, grecs dIonie qui fondèrent Phocée, romains de Domitius qui fondèrent la province Narbonnaise, Wisigoths, Ostrogoths et autres Sarrasins…une histoire millénaire et tumultueuse. Un peu plus loin, vers Saint-Rémy de P., le site antique de Glanum, ville romaine construite sur un sanctuaire Gaulois datant du 6ème siècle AV JC, sur une source. Thermes, piscines, temples, forum, arc monumental (sur lequel on peut voir des captifs, hommes et femmes, au pied de trophées, laissant transparaître leur abattement), fortifications, et autres vestiges faisant surgir une cité, une civilisation faite d’hommes, de dieux, de pratiques, de rites aujourd’hui disparus (au moins en apparence). Et comme il est difficile d'imaginer, à partir de ces quelques traces minérales, la vie de ces hommes, pareils à nous; C.Levi-Strauss, parlant de sa vie d'ethnologue, dit à un moment (dans sa conversation avec Eribon, je crois) combien un film de 5 minutes de la vie d'une cité Grecque dans le courant du Vième siècle av JC nous éclairerait bien plus que les milliers de livres d'histoire et de travaux ethnologiques écrits depuis...Evoquant aussi son regard singulier, à la fois proche et éloigné, de l'homme attentif au temps présent mais décalé dans le temps et l'espace.
Eygalières se résume aujourd’hui à quelques rues tortueuses gangrenées par les agences immobilières aux photos de piscines bleues (ces thermes modernes), les « artisans d’art » et les troquets pour touristes Belges ou germano-pratins roulant Porsche ou Q7, genre Michel Drucker. Quelques indigènes blasés et au bronzage agricole, aux terrasses de cafés manifestement également indigènes. Mon ami Marc-Aurèle me dirait que même ces pitres friqués dans leurs palaces provençaux merdiques font partie du Tout, de ce Dieu, ce Cosmos qui est notre seul horizon et qu’il serait aussi vain d’attendre autre chose d’eux que d’imaginer qu’un figuier puisse produire autre chose que des figues…
Les maisons à péristyle de Glanum dont il ne reste que quelques pierres alignées sont comme ce temple païen recyclé par des Gallo-romains christianisés ou ce buste de Marc-Aurèle retrouvé dans les égouts d’Avenches, ils nous rappellent que nous sommes mortels, que seul le présent compte. Et le passé pour O’Brien…Memento Mori.
Ca aide à vivre.
(Celto-Ligure)
22:50 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : aquileria, marc-aurèle