14/05/2014
A l'Est, rien de nouveau:)
"Le fils de Joe Biden va travailler pour le plus grand producteur de gaz privé d’Ukraine: Burisma Holdings, le plus grand producteur de gaz privé de l’Ukraine, a élargi son conseil d’administration en nommant sur M. Robert Hunter Biden comme nouvel administrateur. Robert Hunter Biden, 44 ans, n’est autre que le fils cadet du vice-président américain Joe Biden (les deux hommes ci-contre). Avocat de formation, il sera chargé de la section juridique de la société et fera le lien avec l’international. Le fils Biden a précisé :« Les objectifs de Burisma en termes d’innovation et de position dominante dans le domaine de l’industrie du gaz naturel feront d’elle le puissant moteur d’une économie forte en Ukraine. En tant que nouveau membre du Conseil, je crois que mes conseils à la société sur les questions de transparence, de gouvernance et de responsabilité et d’expansion internationale contribueront à l’économie et bénéficieront à la population ukrainienne. »
Le président du conseil d’administration de Burisma Holdings, M. Alan Apter, a déclaré :« La stratégie de la société vise à la plus forte concentration de personnel professionnel et la mise en place des meilleures pratiques de l’entreprise, et nous sommes ravis que M. Biden se joigne à nous pour nous aider à atteindre ces objectifs. »
M. Biden est membre du barreau de l’État du Connecticut, du District de Columbia, de la Cour suprême des États-Unis et de la Cour fédérale des réclamations." suite/source E et R/ Business Insider/ Guardian
********************************************************************************************"Pendant la crise ukrainienne, les affaires continuent. Le pétrolier français Total est en négociation avec le russe Lukoil pour développer les immenses ressources potentielles de pétrole de schiste de la Sibérie occidentale, a rapporté hier le Financial Times. Lukoil, première firme énergétique privée de Russie, envisage d'établir une joint-venture avec Total, selon des sources proches des négociations citées par le quotidien économique londonien. Lukoil et Total ont refusé de commenter. Total avait déjà été signalée parmi les compagnies occidentales candidates au développement de la très vaste formation géologique de Bajenov, censée receler peut-être davantage de pétrole "de schiste" (ou plus exactement de roche-mère) qu'il ne s'en trouve aux Etats-Unis, où l'exploitation par fracturation hydraulique de cette source non-conventionnelle d'hydrocarbure est toujours en plein boom. (...) Pour Moscou, le développement du pétrole de roche-mère est une nécessité non moins pressante que pour Total. La Russie est confrontée au déclin de nombre de ses champs matures de pétrole conventionnel, au point que l'Agence internationale de l'énergie redoute une possible chute imminente des extractions du deuxième producteur mondial de brut derrière l'Arabie Saoudite. La fuite des capitaux que serait en passe d'entraîner le rattachement de la Crimée à la Russie ne paraît pas affecter le secteur du pétrole. En dépit de la fermeté affichée par Berlin à l'égard de Moscou, le directeur général du groupe allemand Siemens a rencontré Vladimir Poutine mercredi afin de lui promettre de ne pas interrompre ses investissements, ni sa coopération avec Gazprom, note le Financial Times. Il faut dire que les places sont chères : Moscou signale avoir également levé des fonds du côté de la Chine et du golfe Persique. (...)" suite/Oilman Photo: et pendant ce temps à l'Ouest...
21:55 | Lien permanent | Commentaires (51) | Tags : oilman, ukraine, joe biden
02/05/2014
fog of war
"En écoutant Lavrov aujourd’hui, je suis venu à la conclusion que le régime à Kiev était en effet sur le point d’essayer d’attaquer l’Ukraine orientale. Ce n’est pas seulement Lavrov, l’Internet russe est en « alerte rouge » et regorge de rumeurs et de spéculations sur une attaque imminente. Cela pose un certain nombre de questions:
- Pourquoi la junte à Kiev reviendrait-elle si ouvertement sur l’accord de Genève ?
- Pourquoi attaquer alors que les chances de succès sont très faibles ?
- Pourquoi attaquer quand elle sait que la Russie interviendrait presque certainement ?
- Pourquoi les Etats-Unis sont clairement derrière cette stratégie ?
J’ai une hypothèse que je voudrais soumettre à votre attention.
Tout d’abord, la junte à Kiev est en train de renier l’accord de Genève tout simplement parce qu’elle ne peut pas se conformer à ses conditions. Rappelez-vous, la junte est composée de quelques hommes politiques soigneusement choisis par les États-Unis et quelques oligarques ukrainiens. Ils ont de l’argent, mais pas de pouvoir. Comment pourraient-ils imposer quoi que ce soit aux fanatiques bien armés et déterminés du secteur droit ?
Deuxièmement, l’Ukraine orientale est perdue, de toute façon. Aussi, la junte à Kiev a à choisir parmi les options suivantes :
- Soit l’Ukraine orientale s’en va par voie de référendum, et elle ne fait rien pour l’en empêcher.
- Soit l’Ukraine orientale s’en va, mais seulement après une certaine violence.
- Soit l’Ukraine orientale s’en va à la suite d’une intervention militaire russe.
De toute évidence, l’option «a» est de loin la pire. L’intérêt pour l’option «b» est mitigé, tandis que l’option ‘c’ est la plus intéressante. Si on y réfléchit, cette option donnera l’impression que la Russie a envahi l’est de l’Ukraine et que les gens là-bas n’ont eu aucun mot à dire à ce sujet. Cela ralliera également le reste de l’Ukraine autour de son drapeau. La catastrophe économique sera attribuée à la Russie et l’élection présidentielle du 25 mai pourra être annulée en raison de la «menace» russe. En plus de cela, une guerre, quelle que soit son absurdité, est le * parfait * prétexte pour introduire la loi martiale qui peut être utilisée pour réprimer le Secteur Droit ou toute personne exprimant des vues que la junte n’aime pas. C’est un vieux truc : déclenchez une guerre et les gens vont se rallier autour du régime au pouvoir. Créez la panique, et les gens vont oublier les vrais problèmes.
En ce qui concerne les Etats-Unis – ils savent aussi que l’Ukraine orientale est perdue. Avec la Crimée et l’Ukraine orientale disparues, pourquoi ne pas simplement utiliser le reste de l’Ukraine, qui a exactement * zéro * valeur pour l’Empire, comme un moyen de créer une nouvelle guerre froide, ce qui serait beaucoup plus sexy que la guerre mondiale contre le terrorisme ou la vieille guerre contre la drogue. Après tout, si la Russie est obligée d’intervenir militairement, l’OTAN devra envoyer des renforts pour « protéger » des pays comme la Pologne ou la Lettonie, juste au cas où Poutine déciderait d’envahir l’ensemble de l’UE.
Au bout du compte, les voyous au pouvoir à Kiev et les Etats-Unis * sachant * que l’Ukraine orientale est perdue pour eux, le but de l’attaque imminente n’est pas de «gagner» contre les rebelles russophones ou, encore moins, de «gagner» contre l’armée russe, elle doit juste enclencher assez de violence pour forcer la Russie à intervenir. En d’autres termes, puisque l’Est est perdu de toute façon, il vaut mieux le perdre à cause de la « horde des envahisseurs russes» que de le perdre à cause de la population civile locale.
Donc, le but de la prochaine attaque ne sera pas de gagner, mais de perdre.Ca, l’armée ukrainienne peut encore faire.
Deux choses peuvent arriver à déjouer ce plan:
- L’armée ukrainienne pourrait refuser d’obéir à ces ordres manifestement criminels (le fait de devenir une cible de l’armée russe pourrait aider certains officiers à faire le bon choix « purement moral »).
- La résistance locale pourrait être assez forte pour se tirer d’une telle opération et arriver à la paralyser.
L’idéal serait une combinaison des deux.
Du point de vue de la Russie, les choses sont assez simples: il est infiniment mieux pour la Russie d’avoir la séparation de l’Est sans aucune intervention de sa part. Si la force d’attaque est assez folle pour utiliser des blindés, l’artillerie ou la puissance aérienne, la Russie pourrait décider de faire des frappes aériennes sans réellement envoyer des forces terrestres. Ils pourraient également utiliser les capacités de guerre électronique pour créer plus de chaos dans la force d’attaque. Des attaques ponctuelles limitées pourraient aussi servir à démoraliser les forces attaquantes. Ce que la Russie doit éviter à tout prix c’est de se trouver contrainte à s’engager dans des opérations offensives urbaines qui sont toujours dangereuses et sanglantes. Il est donc absolument essentiel que les gens du pays prennent le contrôle de leurs propres rues, villages et villes.
Lavrov a prononcé aujourd’hui un avertissement très direct : si les choses dérapent dans l’est de l’Ukraine la Russie interviendra. Espérons que quelqu’un en Occident réalisera enfin que les Russes ne bluffent jamais et que le message aura vraiment été compris. Je ne suis pas très optimiste cependant. Si Lavrov a éprouvé le besoin de faire une interview de 30 minutes entièrement en anglais dans laquelle il a clairement comparé la situation en Ukraine aujourd’hui à celle de l’Ossétie le 08.08.08, c’est probablement parce que les Russes ont des renseignements indiquant qu’une attaque est imminente.
Nous le saurons très bientôt."
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NB: lire aussi De Defensa sur l'Ukraine
22:20 | Lien permanent | Commentaires (172) | Tags : ukraine, de defensa, the saker
27/02/2014
...
22:58 | Lien permanent | Commentaires (16) | Tags : moby, ukraine
21/02/2009
paysages
Le train est un accélérateur de perception. Ou de sensation. C’est pas clair, je sais.
Mais c’est toujours l’impression que me font ces longs voyages sur le rail. Je pensais à cela il y a deux jours entre Lyon et Annecy. Plongé dans le monde terrifiant et léger du Kaputt de Malaparte et regardant filer les paysages du Dauphiné et de Savoie. Plaines et cluses, barres rocheuses enneigées au soleil, fonds de vallée sombres et froids, forêts nues et champs labourés –bien loin des tournesols de Moldavie ou d’Ukraine, ces yeux noirs bordés de cils dorés craquant sous la pluie, qui parsèment le périple de Malaparte. Hameau de fermettes serrées aux toits de tôle rouillée, granges en bois au soleil d’hiver, chapelles et lavoirs, quelques chevaux immobiles dans l’air glacé, buses sentinelles et vols de corbeaux. Quelques fermes solides à étages et toits qui débordent, galeries remplies de foin ou de bois, murs de galets en bas, de pierres froides ou de pisé plus haut dans les vallées. Vieux paysans en bleu et casquette en maraude à pieds sur les chemins ou dans leur 4L. Dépôts SNCF désaffectés, piles de traverses, odeur de goudron puissante et wagons abandonnés. Gorges du Fier, ce coup de couteau dans la terre, eaux froides et claires, viaducs et tunnels…Ce voyage immobile me rend immanquablement mélancolique. Peut-être est-ce simplement la beauté des paysages.
Je repense à Millet et sa conviction que la guerre est un puissant accélérateur de vie. Millet, qui ne rêvait que de littérature, avait compris que s’engager à vingt ans dans cette guerre du Liban allait lui faire gagner des années, le transformer radicalement. Que l’expérience de la guerre, de la mort, pouvait être précieuse pour écrire. Comme d’autres expériences profondes ou traumatisantes, sans doute.
Quel rapport, finalement ? Vois pas bien, en fait. Peut-être la singularité du regard.
« Une nuit, j’allais m’étendre dans un champ de tournesols. C’était réellement une forêt de tournesols, une vraie forêt. Courbés sur leur haute tige velue, leur grand œil noir tout rond, aux longs cils jaunes, voilé par le sommeil, les tournesols dormaient, tête basse. C’était une nuit sereine, le ciel plein d’étoiles brillait de reflets verts et bleus comme le creux d’une immense coquille marine. Je dormis d’un sommeil profond et, à l’aube, je fus réveillé par un crépitement étouffé et sourd. On eut dit le bruissement de gens marchant pieds nus dans l’herbe. Je tendis l’oreille en retenant mon souffle. Du bivouac voisin, venaient de faibles éternuements de moteurs, et des voix rauques qui s’appellaient dans le bois prés du ruisseau. Un chien aboyait au loin. Au bout de l’horizon, le soleil faisait craquer la noire coquille de la nuit, s’élevait, rouge et chaud, sur la plaine brillante de rosée. Ce froissement devenait immense, grandissait de minute en minute ; c’était un crépitement de buissons en flammes, c’était le craquement en sourdine d’une interminable armée marchant précautionneusement sur des chaumes. Etendu à terre je retenais mon souffle et regardais les tournesols soulever lentement leurs paupières jaunes, ouvrir petit à petit leurs yeux. Tout à coup, je m'aperçus que les tournesols levaient la tête et, virant lentement sur leur haute tige, tournaient leur grand oeil noir vers le soleil naissant. C'était un mouvement lent, égal, immense. Toute la forêt de tournesols se tournait afin de regarder la jeune gloire du soleil. Et moi aussi je levais la tête vers l'Orient, en regardant le soleil monter peu à peu parmi les rouges vapeurs de l'aube, sur les nuages de fumée bleue des incendies, dans la plaine lointaine. » (Kaputt, Malaparte, 1943.)
18:10 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : millet, malaparte, savoie, train, ukraine