19/07/2008
Common decency
19:56 | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : dekkers/ cesar
18/07/2008
just a break aprés K Marx et A de Benoist...
19:26 | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : trop c'est trop
Droite
« La droite a été la grande vaincue de l’histoire, puisqu’elle a pratiquement perdu tous les combats dans lesquels elle s’est engagée. L’histoire des deux derniers siècles est celle de ses défaites successives. Une telle succession d’échecs donne à penser que la supériorité de ses adversaires s’est surtout nourrie de ses faiblesses. A l’origine, qu’est-ce que la droite possédait en propre de meilleur ? Je dirai, pour faire bref, un système de pensée anti-individualiste et anti-utilitariste, doublée d’une éthique de l’honneur, héritée de l’Ancien Régime. Elle s’opposait par là frontalement à l’idéologie des Lumières, dont le moteur était l’individualisme, le rationalisme, l’axiomatique de l’intérêt et la croyance au progrès. Les valeurs dont elle se réclamait étaient à la fois des valeurs aristocratiques et des valeurs populaires. Sa mission historique était de réaliser l’union naturelle de l’aristocratie et du peuple contre leur ennemi commun : la bourgeoisie, dont les valeurs de classe trouvaient précisément leur légitimation dans la pensée des Lumières. Mais cette union ne s’est réalisée que pendant de très brèves périodes, par exemple au lendemain de la Commune de Paris, jusqu’au moment où les délires antidreyfusards vinrent mettre un terme aux espoirs qu’avait fait naître le boulangisme à ses débuts.
La droite tient que l’homme est naturellement social. Cependant, elle n’a jamais développé une théorie cohérente de la communauté ou du lien social. Elle n’a jamais exploré sérieusement l’opposition entre les idéaltypes du soi-propriétaire (l’homme défini par le droit de jouissance de ce dont il est propriétaire, tel que le pose l’individualisme libéral) et le soi lié-à-autrui. Elle n’a jamais été capable non plus de formuler une doctrine économique véritablement alternative du système de la marchandise.
Jean-Pierre Maxence parlait aussi, très justement, de « défaut de contacts populaires » : « On se proclamait “homme du peuple” mais on pensait, plus on sentait, en petit-bourgeois ».
Au lieu de soutenir le mouvement ouvrier et le socialisme naissant, qui représentait une saine réaction contre l’individualisme qu’elle critiquait elle-même, la droite n’a que trop souvent défendu les exploitations humaines les plus affreuses et les inégalités les plus politiquement insupportables. Elle s’est rangée du côté des classes possédantes, participant objectivement de la lutte de la bourgeoisie contre les « partageux » et les « classes dangereuses ». Il y a eu des exceptions, mais rares. Et les théoriciens n’ont que trop souvent été à la remorque de leur public (qu’on pense aux écrits du jeune Maurras en faveur du socialisme et du fédéralisme et à la dérive conservatrice de l’Action française). Défendant la nation, la droite a rarement compris que la nation, c’est avant tout le peuple. Elle a oublié la complémentarité naturelle des valeurs aristocratiques et des valeurs populaires. Au moment du Front populaire, on l’a vu tonner contre la « culture des congés payés ». Elle a toujours préféré l’ordre à la justice, sans comprendre que l’injustice est un suprême désordre, et que l’ordre n’est lui-même bien souvent qu’un désordre établi.
Elle aurait pu, comme Herder, développer une philosophie de l’histoire fondée sur la diversité des cultures et la nécessité d’en reconnaître la valeur universelle, ce qui l’aurait amenée à soutenir les luttes en faveur de l’autonomie et de la liberté des peuples, à commencer par les peuples du Tiers-monde, premières victimes de l’idéologie du progrès. Au lieu de cela, elle a défendu le colonialisme, qu’elle avait pourtant à juste titre condamné dans un premier temps (ce qui ne l’empêche pas de se plaindre à l’occasion d’être « envahie » ou « colonisée » à son tour).
La droite a oublié que son seul véritable ennemi est l’argent, et qu’elle devait de ce fait s’éprouver comme l’alliée objective de tout ce qui conteste le système de l’argent. Elle est passée par paliers du côté de ce système. Elle était mieux placée que quiconque pour défendre, en les reformulant, des valeurs anti-utilitaristes de gratuité et de désintéressement. Peu à peu, elle s’est convertie à l’axiomatique de l’intérêt et à la défense du marché. Parallèlement, elle est tombée dans l’ordre moral, le militarisme, le nationalisme, qui n’est qu’un individualisme collectif que les premiers contre-révolutionnaires avaient condamné comme tel. Le nationalisme l’a fait tomber dans la métaphysique de la subjectivité, maladie de l’esprit systématisée par les modernes, lui faisant du même coup perdre de vue la notion de vérité.
Elle aurait dû être le parti de la générosité, de la « common decency », des communautés organiques ; elle n’est que trop souvent devenue le parti de l’exclusion, de l’égoïsme collectif et du ressentiment. Bref, la droite s’est trahie elle-même quand elle a commencé à accepter
l’individualisme, le mode de vie bourgeois, la logique de l’argent, le modèle du marché. »
Alain de Benoist, Entretien sur les droites françaises, ici.
18:47 | Lien permanent | Commentaires (2) | Tags : droite, gauche, alain de benoist
17/07/2008
Bourgeoisie, révolution et globalisation
« La bourgeoisie…partout ou elle a conquis le pouvoir, a foulé aux pieds les relations féodales, patriarcales et idylliques. Tous les liens complexes et variés qui unissaient l’homme féodal à ses supérieurs naturels, elle les a brisés sans pitié pour ne laisser subsister d’autre lien, entre l’homme et l’homme, que le froid intérêt, les dures exigences du paiement au comptant. Elle a noyé les frissons sacrés de l’extase religieuse, de l’enthousiasme chevaleresque, de la sentimentalité naïve dans les eaux glacées du calcul égoïste. Elle a fait de la dignité personnelle une simple valeur d’échange ; elle a substituée aux nombreuses libertés, si chèrement conquises, l’unique et impitoyable liberté du commerce. La bourgeoisie a dépouillée de leur auréole toutes les activités qui passaient jusque là pour vénérables et qu’on considérait avec un sain respect. Le médecin, le juriste, le prêtre, le poète, le savant, elle en a fait des salariés à ses gages. La bourgeoisie a déchiré un voile de sentimentalité qui recouvrait les situations de famille et les a réduites à n’être que de simples rapports d’argent…
[…] La bourgeoisie ne peut exister sans révolutionner constamment les instruments de production, ce qui veut dire les conditions de la production, c’est-à-dire tous les rapports sociaux ; Tous les rapports sociaux, traditionnels et figés, avec leur cortège de conceptions et d’idées antiques et vénérables, se dissolvent ; ceux qui les remplacent vieillissent avant d’avoir pu s’ossifier. Tout ce qui avait solidité et permanence s’en va en fumée, tout ce qui était sacré est profané, et les hommes sont forcés, enfin, d’envisager leurs conditions d’existence et leurs rapports réciproques avec des yeux désabusés. Poussée par le besoin de débouchés toujours nouveaux, la bourgeoisie envahit le globe entier. Il lui faut s’implanter partout, exploiter partout, établir partout des relations ; Par l’exploitation du marché mondial, la bourgeoisie donne un caractère cosmopolite à la production et à la consommation de tous les pays. Au désespoir des réactionnaires, elle a enlevé à l’industrie sa base nationale, Les vieilles industries nationales ont été détruites et le sont encore tous les jours.
Sous peine de mort, elle force toutes les nations à adopter le mode bourgeois de production : elle les force à introduire chez elles ce qu’elle appelle civilisation, c’est-à-dire à devenir bourgeoises. En un mot, elle se façonne un monde à son image. La bourgeoisie supprime de plus en plus l’émiettement des moyens de production, de la propriété et de la population. Elle a aggloméré la population, centralisé la production, et concentré la propriété dans un petit nombre de mains. La conséquence fatale de ces changements a été la centralisation politique. Des provinces indépendantes, tout justes fédérées entre elles, ayant des intérêts, des lois, des gouvernements, des tarifs douaniers différents, ont été réunies en une seule nation, avec un seul gouvernement, une seule loi, un seul intérêt national de classe, derrière un seul cordon douanier… »
Karl Marx et Friedrich Engels, Manifeste du parti communiste, 1848.
"La suite du livre vous plairait moins", me dit @cadichon en commentaire. Suis bien d’accord. Je me suis dit qu’une mise au point n’est peut-être pas inutile.
Non, hoplite n’est pas marxiste...
Je n’ai pas de sympathie particulière pour la lutte des classes, la dictature du prolétariat, celle-là même qui devait amener cette société sans classe ou le prolétaire, débarrassé de l’oppression des classes possédantes –du capital, recevrait une juste rémunération pour son travail…
Et l’expérience, la praxis, communiste ne m’inspire que de l’horreur, comme à tout être sain d’esprit. A cet égard la survivance d’une gauche radicale communiste qui ne dit plus son nom, notamment en France avec différentes mouvances trotskystes, ne laisse pas de m’étonner. Je repense toujours avec bonheur à la façon dont Castoriadis avait réglé son compte aux thuriféraires de la IV ème internationale : « la fraction en exil de la bureaucratie soviétique » Oh, oh, oh.
Deux choses m’intéressent particulièrement dans ce court extrait :
- d’abord son caractère visionnaire : Marx a anticipé le triomphe de l’économie de marché sous forme d’une globalisation planétaire, sorte d’internationalisme du capital. Peut-être l’internationalisme prolétaire de la lutte des classes répondait-il à sa pré science de la montée en puissance irrésistible de l’économie de marché ?
- ensuite, la façon dont Marx a compris le caractère profondément révolutionnaire sinon d’une classe bourgeoise, tout au moins des valeurs bourgeoises. Marx a saisi combien bourgeoisie, modernité et capitalisme sont consubstantiels…Combien, depuis l’essor, dans le Moyen-Âge, de cette classe industrieuse de commerçants, de marchands, acquise à la rationalité, à l’économie, au culte de l’argent puis aux idéaux des Lumières, va mettre à bas le vieil ordre féodal pour prendre définitivement le pouvoir en s’affranchissant de toutes sortes de tutelles et contraintes et en imposant, partout, ses valeurs individualistes et sa conception anthropologique utilitariste.
22:34 | Lien permanent | Commentaires (4) | Tags : marx, révolution, bourgeoisie, capital, communiste
14/07/2008
Global
J’ai compris ça l’autre soir, en regardant sans le regarder un nième débat entre un leader syndical et un ministre du gouvernement sur i-télé, je crois. On parlait 35 heures, flexibilité, flexi sécurité, heures supplémentaires, avantages acquis, etc, etc. L’irréel de la situation, le coté absurde et tragique à la fois : deux joueurs de cartes sur le pont du Titanic…
D’un coté, un leader syndical représentant 15 à 20 % des salariés syndiqués, soit environ 3 à 5% de l’ensemble des salariés de ce pays, et de l’autre le représentant du gouvernement d’un petit état nation européen, marqué par le déclin économique, démographique et culturel, et dont l’essentiel des lois depuis quelques années ne sont que l’application de directives européennes, elles-mêmes votées par des hommes, des commissions, à la légitimité incertaine.
Cela me rappelait les débats politiques de mon enfance, c’est-à-dire de cette époque dite moderne ou les mots politique et social avaient encore un sens avant qu’ils ne soient soumis à l’économie, avant que nous passions d’une économie de marché largement étatisée à une société de marché ouverte sur un monde globalisé. Ce monde post moderne dans lequel le chiffre d’affaire de Général Motors est supérieur au PNB de l’Indonésie. Un monde ou les stratégies du capitalisme planétaire n’ont que faire des exigences sociales d’états nations obsolètes perméables à tous les flux trans nationaux de valeurs, d’hommes et de capitaux. Obsolètes car incapables désormais de peser de façon significative sur des réseaux qui se moquent bien des frontières, des lois, des hommes politiques, des commissions, des états et des leaders syndicaux…
Quel sens avait cette discussion entre deux hommes qui ne maîtrisent rien ? Aucun.
De quelle influence politique ou sociale peut se prévaloir une organisation syndicale minuscule, à fortiori ultra minoritaire au sein d’un salariat français massivement non syndiqué, dans un monde ouvert comme le notre ? D’aucune.
De Quelle marge de manœuvre, de quel poids décisionnel peut se prévaloir ce membre d’un gouvernement libéral dont la famille politique a fait plus que quiconque pour accélérer la destruction d’un modèle de société et de valeurs qu’ils font semblant de protéger ? D’aucuns.
Deux hommes impuissants pensant ou affectant de penser que le politique avait encore un poids quelconque sur les conditions de travail ou l’organisation de notre société…Du cinéma, quoi.
Constat : ce monde post moderne globalisé, fruit de cette mondialisation économique et financière mais aussi culturelle est régi par des facteurs économiques au détriment de facteurs politiques qui ne pèsent plus rien. Chaque jour apparaît un peu plus évident la disparition des politiques nationales voire trans nationales (union européenne) devant les impératifs du marché planétaire qui se joue des exigences juridiques, sociales ou culturelles de l’ancien monde moderne ou existaient des politiques économiques, monétaires, sociales étatiques et inter étatiques. L’Europe elle-même n’est qu’un marché, certes conséquent, qu’une région du monde soumise aux impératifs d’un marché globalisé. Il s’agit en fait d’une véritable révolution dont la plupart des gens de ce bas monde ne réalisent pas la signification ni les conséquences, notamment pas ces deux apparatchiks archaïques, vestiges d'un monde disparu ou en passe de l'être, qui discutaient à i-télé...
Il ne faut pas voir dans ma prose inepte une critique de l’économie de marché ou de la démocratie libérale, qui me paraissent être deux systèmes économique et politique raisonnables. Je sais trop par ailleurs ce que doit la civilisation occidentale à cette modernité singulière issue de l’état de droit, de l’économie de marché et de l’existence d’une classe moyenne bourgeoise industrieuse depuis la fin du moyen-âge. Non, il faut y voir une critique radicale de cette transformation du monde qui semble s’inscrire dans la dynamique propre du capitalisme, la création d’un marché mondial.
Il s’agit bien sur d’un phénomène complexe à propos duquel beaucoup de choses érudites ont été dites…J’y vois, moi, certaines choses nouvelles et radicales :
-l’autonomisation de l’économique par rapport au politique. Jusqu’alors, la vie économique n’était qu’une partie de l’organisation des états nations, directement dépendantes des exigences politiques –c’est-à-dire du contrôle démocratique- mais aussi sociales ou culturelles. Cela n’est plus le cas aujourd’hui. Phénomène aggravant, la sphère financière, spéculative, s’est également autonomisée de la sphère économique proprement dite,
-avec pour conséquence directe que ce ne sont plus les états nations qui arbitrent et décident, mais bien les marchés financiers et les firmes internationales. Passant ainsi d’un monde organisé autour des états nations à une économie monde, structurée par des acteurs globaux qui échappent par nature à tout contrôle sociétal ou étatique. Ce qui signifie la déterritorialisation du système capitaliste, hors de ses limites nationales habituelles ou il pouvait être soumis aux orientations du politique ou à l’audit civil. C’est l’avènement du capital en réseaux, en flux, qui lui permet de s’émanciper de toute contrainte politico étatique. Ce qui autorise une pression à la baisse des salaires, le renforcement d’une immigration dans les pays du Nord, amenant une main d’œuvre non qualifiée mais peu coûteuse et peu exigeante en terme de salaires et de contraintes sociales.
-l’irruption dans le secteur marchand de secteurs entiers qui auparavant lui échappait en grande partie : le sport, la culture, le monde de l’art, les ressources naturelles, les services, la propriété intellectuelle, etc. Ce que certains -nos amis du monde diplo- désignent sous le vocable de marchandisation du monde.
-finalement la disparition de ce paradigme de l’état providence qui depuis l’après guerre était dominant en occident car il représentait un compromis historique entre le capital et le travail, entre les nécessités du capital et les exigences sociales.
-cette deconnection de l’économique et du social va de pair avec l’impuissance grandissante des états nations dont les marges de manœuvre, notamment en terme de protection sociale ou de droit du travail sont quasiment nulles devant un capital trans national prompt à délocaliser structures, hommes et capitaux ou à faire pression à la baisse sur les salaires par l’intégration d’une main d’oeuvre immigrée.
Ou comment cette impuissance des médiateurs étatiques ou sociaux réduit radicalement leur légitimité démocratique. A quoi bon voter, élire un gouvernement ou des représentants syndicaux, s’ils n’ont plus de poids dans ce bras de fer entre le corps social et ces nouveaux acteurs globaux ? C’est en ce sens que les états nations me paraissent obsolètes dans ce nouvel ordre mondial, car trop petits pour peser véritablement.
-cette nouvelle organisation du monde, aussi complexe et mouvante soit-elle a pour conséquence une uniformisation des modes de vie, des attitudes et des comportements, favorisant l’éradication de cultures traditionnelles et, en retour, l’exacerbation de revendications identitaires, légitimes, de la part de peuples qui se sentent menacés dans leur existence même.
Une sorte de nivellement par le bas de toutes les cultures, réduites à un dénominateur commun consumériste. Une homogénéisation des cultures par le marché, instituant le primat des valeurs marchandes et un modèle anthropologique utilitariste : l’homme se définit comme un individu soucieux de produire et consommer, à l’exception de toute autre ambition…une sorte de non culture universelle du marché.
Un universalisme de l’avoir ou les individus, atomisés, aliénés et anomiques, ne sont plus définis que par leur capacité à produire et à consommer.
Illustration ici.
16:48 | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : capitalisme, marché, globalisation, mondialisation, économie, anomie, aliénation
