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19/11/2009

une vie semblable

Inrocks696-2.gif« Je suis souvent étonné que des hommes qui se vantent de professer la religion chrétienne, c’est-à-dire l’amour, la joie, la paix, la maîtrise de soi-même et la bonne foi envers tous, rivalisent d’iniquité et exercent quotidiennement la haine la plus violente les uns contre les autres, de sorte qu’on reconnaît la foi de chacun par cette haine et cette iniquité plutôt que par les autres sentiments. Les choses en sont maintenant venues au point que l’on ne peut reconnaître si quelqu’un est chrétien, turc, juif ou païen, si ce n’est par l’aspect extérieur du corps et par le vêtement, et en sachant quelle Eglise il fréquente, à quelle opinion il se range, dans les mains de quel maître il jure. Pour le reste, ils mènent tous une vie semblable. » Spinoza, Préface au Tractatus Théologico-politicus.

Remplaçons « religion chrétienne » par antifascisme et anti racisme, « aspect extérieur du corps et du vêtement » par nature du tatouage ou du piercing et type d’uniforme habituellement porté (roller, rappeur, raver, etc.), « quelle Eglise il fréquente » par quel tabloïd il lit (Libération, Les Inrocks, Nova magazine) ou par quelle musique il écoute (Manu chao, Zebda, Noir désir) et je pense que nous tiendrons là une assez bonne description des formes contemporaines du Problème de Spinoza.

Jean claude Michéa, Orwell éducateur, 2003.

28/08/2009

aveuglement

sanspapiers_800_1.jpg« Il va sans dire que la vieille droite qui, dans son ensemble n’a lu ni Marx ni Lénine, n’est pas prés de lire Gramsci. On se demande d’ailleurs ce qu’elle peut lire en dehors de journaux satyriques et des magazines littéraires quand on s’aperçoit qu’au cours de ces dernières années, aucuns des ouvrages fondamentaux dont elle aurait pu tirer argument, dans un sens ou dans l’autre, ne semble avoir retenu son attention.

La paresse intellectuelle de la vieille droite ne s’explique pas seulement par sa méfiance instinctive vis-à-vis des idées pures. Pendant longtemps, les Saintes Ecritures lui ont servi de doctrine. Tout étant censé avoir été dit, il apparaissait inutile de vouloir constituer une autre Summa autre que celle de Thomas d’Aquin. Cette conviction prévaut encore aujourd’hui dans un certain nombre de cénacles. Mais pour combien de temps ? Après avoir été, nolens volens, la religion de l’Occident, après avoir été portée par un esprit, une culture, un dynamisme européens, qui l’avaient précédé de quelques millénaires, le christianisme, opérant un retour aux sources, redécouvre aujourd’hui ses origines. Pour assumer sa vocation universaliste et devenir la religion du monde entier, il entend se « désoccidentaliser ».

Dans l’immédiat, il développe une stratégie qui revient à se demander si elle ne revient pas à lâcher la proie pour l’ombre. Le christianisme sociologique est entrain de disparaître, laissant la place au militantisme évangélico-politique. L’impulsion vient de la tête. La hiérarchie accélère le mouvement. Les traditionalistes, attachés dans leur Eglise à tout ce dont celle-ci ne veut plus entendre parler, auront du mal à faire croire que le meilleur moyen d’endiguer la « subversion » est de batailler dans une croyance qui les a déjà abandonnés pour passer à l’ennemi. »

Alain de Benoist, Droite, l’ancienne et la nouvelle, 1979.

27/03/2009

La Cour pénale internationale doit-elle accuser Benoit XVI?

ah, ah! pas de panique, il s'agit du titre volontairement provocateur d'un débat du politiclub. Et l'objet de quelques réflexions en passant.

b16 et la religion catholique me semblent anachroniques dans ce monde occidental pour plusieurs raisons:

-la religion comme toute hétéronomie est devenue incompréhensible voire haïssable pour l'essentiel de nos contemporains acquis au culte de l'autonomie et de l'individualisme libéral.
-cette tradition d'hétéronomie est obsolète en occident, contrairement à la plupart des sociétés traditionnelles qui survivent hors l'occident moderne avec un besoin de transcendance que les occidentaux ont perdu de vue dans leur monde consumériste horizontal.
-ce qui ne signifie nullement que nous autres occidentaux ne ressentions point le besoin d'un au-delà pour vivre, quel qu'il soit.
-la relation des occidentaux déchristianisés avec la religion catholique est étrange: chacun proclame son indifférence à l'égard de cette religion, désormais moribonde en Europe de l'ouest, mais le moindre propos du pape est épié et discuté voire condamné avec sévérité, comme si l'église catholique représentait encore un danger dans nos contrées sécularisées. Comme si l'église catholique tenait encore la société...Par ailleurs personne ne s'enquiert jamais de la position de la deuxième religion de France, l'islam, sur ces questions d'actualité; de même concernant le culte protestant ou juif. Comme si l'église catholique cristallisait l'ensemble du ressentiment anti religieux.
-s'il est une religion universaliste, prosélyte et en plein essor en Europe en ce début de XXIème siècle, c'est l'islam, du fait notamment d'une immigration massivement musulmane, africaine ou ottomane. Or les mêmes contempteurs haineux de la religion catholique mourante en France semble sans voix ou pour le moins extrêmement timorés devant les atteintes régulières de l'islam à l'égard du contrat social laïque républicain. Pourquoi? Ceci me parait aller à l'encontre de ceux qui considère l'animosité à l'égard de l'église catholique comme une lutte contre le recours à une hétéronomie, qu'elle qu'elle soit.
-la religion dans nos contrées laïques s'est vue confinée à la sphère privée, au for intérieur (à la "vie simple" comme disaient les Grecs, contrairement à la "vie bonne" qui désigne la vie publique, la politique, la gestion de la cité), contrairement aux sociétés antiques, donc, ou les Dieux étaient omniprésents, et aux sociétés contemporaines traditionnelles dans les quelles la religion reste déterminante dans la structure de la société. Dés lors qu'il s'agit d'une question personnelle (le sida, le sexe, la fidélité, etc), où est la pertinence de porter dans le débat public une question, des prises de position, qui ne relèvent que de l'intime?
-clercs laïques et catholiques ne vivent pas dans le même monde: les premiers en bons zeks de ce monde post moderne soumis à la tyrannie du présent sont incapables de saisir le message pré moderne de cette croyance religieuse impliquant une autorité venant du passé. Dés lors que les sociétés post modernes ont évacué cette tradition, il n'est pas étonnant que l'irruption de règles de vie traditionnelles choquent.
-ainsi la croyance religieuse est devenue dans nos sociétés une opinion parmi d'autres; et je crois que c'est le fait que cette opinion soit politiquement incorrecte qui crée le buzz. L'intolérance absolue de nos modernes apôtres du bien trouve ici de quoi s'exercer sans retenue. Refuser d'adouber les totems du jour (sexualité débridée, homosexualité, homoparentalité, métissage, diversité, etc) c'est une garantie d'opprobre généralisée. Le décalage entre l'évolution sociétale inouïe de nos sociétés et le discours religieux -quel qu'il soi- condamne les églises à paraître toujours plus "réactionnaire"...
lors même que l'église catholique a fait -depuis longtemps- le deuil de son ancienne hégémonie normative.

étrange, étrange.

19/08/2008

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Des églises gonflables sur les plages italiennes

La première église gonflable a été montée, au mois de juillet, sur la plage de Poetto, à Cagliari, en Sardaigne. De 30 mètres de long sur 15 de large, de couleur noir et fuchsia, avec autel et confessionnaux, elle a été dressée en cinq minutes à l'aide de cinq compresseurs, précisait La Repubblica du 20 juillet. Le prêtre Andrea Brugnoli, à l'origine de l'affaire, a expliqué au quotidien italien qu'il va à la rencontre des fidèles et pallie ainsi l'absence d'église autour des sites de divertissement à la mode.

Ce prêtre des jeunes, qui s'acharne à évangéliser dans les endroits les plus insolites, des "auto grills" aux discothèques, dit avoir choisi d'installer son lieu de culte au beau milieu des baigneurs pour les inciter à la prière : l'église est ouverte la nuit, de 23 heures à 3 heures. Elle n'est pas seulement utilisée en Sardaigne, mais aussi sur les bords de la mer Adriatique, à Ravenne et à Bibione, dont la plage de 400 mètres de large s'étend sur 8 kilomètres, à deux pas d'un Luna Park.

L'idée viendrait d'Angleterre, où une société dévoile ses modèles gonflables sur Internet, photos de mariage à l'appui, dans un jardin privé.

Source

 

05/07/2007

Barbares et gothique.

A mille milles de la dialectique victimaire et raciste de ces faux « indigènes de la république », mais vrais barbares de nos temps modernes, les architectes de l’age roman parlaient à Dieu. Accessoirement, ils étaient sollicités par un problème essentiel à la construction des églises, celui de donner à ces imposants édifices de pierre une couverture, elle même de pierre, qui soit digne de leur majesté. Les charpentes qui couvraient généralement les basiliques manquaient d’allure et, de plus, elles s’enflammaient facilement. La science qu’avaient les Romains de voûter de grands édifices impliquait toute une série de connaissances techniques et mathématiques qui, dans une large mesure, étaient perdues.

Aussi le XIème et le XIIème siècle furent-ils une période d’incessantes expérimentations. Ce n’était pas une petite affaire que de couvrir d’une voûte toute la largeur de la nef. La solution la plus simple semblait  être de lancer la voûte comme on lance un pont sur une rivière. On construisit des piliers formidables pour supporter les arcs de ces ponts. Et il devint vite évident qu’une telle voûte, pour ne pas menacer de s’écrouler, devait être très solidement assemblée et qu’il y fallait un très grand poids de pierre. Pour supporter ce poids énorme, murs et piliers devinrent encore plus forts et plus massifs. Ces voûtes en berceau nécessitaient d’immenses entassements de pierres.

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Aussi les architectes romans se mirent-ils à la recherche d’une technique nouvelle. Ils comprirent qu’il n’était pas absolument nécessaire de construire une voûte si pesante. Et qu’il suffisait d’établir un certain nombre d’arcs de soutien très solides et de remplir les intervalles d’un matériau plus léger. On s’aperçut ainsi que le meilleur système était de lancer entre quatre piliers des arcs de soutien- ou des nervures- croisés en diagonale, puis de combler les sections triangulaires qu’ils déterminent. Cette idée qui devait bientôt révolutionner les méthodes de construction, semble trouver son origine à la cathédrale de Durham ; L’architecte, qui peu de temps après la conquête, employa ainsi la première voûte en croisée d’ogive pour l’intérieur imposant de cette cathédrale était sans doute loin de prévoir toutes les conséquences de son invention.

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Or, à peine les architectes eurent-il réussi à voûter leurs églises, que des recherches nouvelles vinrent donner à toutes ces églises normandes et romanes quelque chose d’archaïque et de démodé. L’idée prit naissance dans le nord de la France : il s’agit du principe du style gothique. Plus qu’une simple innovation technique, c’était une révolution : la découverte que le principe consistant à voûter une église par des arcs croisés en diagonale, pouvait être appliqué beaucoup plus systématiquement et à beaucoup plus grande échelle que les normands ne l’avaient imaginé. Si vraiment les piliers suffisaient à porter les nervures de la voûte, et si les pierres qui formaient les voutins triangulaires n’étaient que du remplissage, alors il n’était plus besoin de murs massifs entre les dits piliers. C’était la possibilité d’élever une espèce d’armature de pierre capable capable de maintenir tout l’édifice. Il n’y fallait que de minces piliers et d’étroites nervures ; On pouvait évider les intervalles sans compromettre la solidité de l’armature ; Plus besoin de lourds murs de pierre : on pouvait les remplacer par d’amples fenêtres. C’était la possibilité de construire une église d’un type tout à fait nouveau, un édifice de pierre et de verre comme le monde n’en avait jamais connu. C’est là l’idée directrice des cathédrales gothiques, idée qui porta ses fruits dans le nord de la France, au cours de la seconde moitié du XII ème siècle.

Evidemment, le principe de la voûte  sur croisée d’ogives n’a pas, à lui seul, entraîné toute la révolution que représente le style gothique. Plusieurs autres inventions techniques ont été nécessaires pour accomplir le miracle. Les arcs en plein cintre- en berceau- du style roman, ne convenaient pas aux buts poursuivis par les constructeurs gothiques. Pour élever la voûte, il fallut renoncer au demi-cercle pour le principe de l’arc brisé, plus ou moins obtu ou aigu selon les exigences de la construction.

Un autre problème se posait : les lourdes pierres de la voûte ne pèsent pas seulement verticalement, mais aussi latéralement. Les piliers à eux seuls ne pouvaient résister à cette poussée latérale. De forts soutiens, de fortes butées -des contreforts- étaient indispensables pour maintenir l’édifice. Mais pour assurer le maintien de la nef, il fallut inventer des contreforts particuliers, les arcs-boutants, passant par dessus le toit des bas-côtés, complétant ainsi l’armature de la voûte gothique. C’est l’égale répartition du poids, des charges, qui permit de réduire de plus en plus la masse de matière employée, sans compromettre la solidité de l’ensemble.

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Mais il serait erroné de ne considérer ces églises que comme des tours de forces d’ingénieurs ; les architectes se préoccupaient avant tout de rendre sensible et émouvante la hardiesse de leur plan. Un église gothique est un miracle architectural résultant du jeu complexe et maîtrisé de poussées et de résistances qui maintiennent la haute voûte. L’intérieur d’une telle église fait immanquablement penser à la frondaison de quelques grands arbres, entre tissage de colonnes et de nervures, fenêtres élancées diffusant à profusion la lumière au travers de vitraux brillants et multicolores représentant des scènes liturgiques.35069d254b847ba2d7e17252014439bd.jpg74a3e21c3d887a030a1cf338b3ee2cb3.jpg

Il est difficile d’imaginer l’impression qu’ont du faire ces monuments sur des gens qui ne connaissaient que les farouches et lourds édifices romans. Ces dernières églises si robustes , si massives -et si belles-, pouvaient bien exprimer quelque chose de l’Eglise militante qui offre un refuge contre les assauts du démon. Les nouvelles cathédrales ouvraient au croyant un autre monde, plus prés du royaume céleste que de la vie terrestre.

 

 

 

(illustrations: en haut Vezelay, puis cathédrale de Durham (1128), puis arcs-boutants de Notre Dame et en bas la Sainte chapelle, à Paris (1248))

15/06/2007

Roman

 En 1066, après la bataille de Hastings, il ne reste en Angleterre aucun édifice entier datant de la période saxonne et très peu d’églises antérieures à 1066 subsistent sur le continent. Les Normands qui débarquèrent en Angleterre apportèrent avec eux un style de construction très évolué qui s’était récemment formé en Normandie et ailleurs. Les nouveaux maîtres de l’Angleterre, seigneurs laïcs et ecclésiastiques, affirmèrent bientôt leur puissance en faisant construire des abbayes et des églises. Le style de ces constructions est connu en Angleterre sous le nom de style normand et, sur le continent, sous le nom de style roman. Il fleurit pendant plus d’un siècle à dater de l’invasion normande.

Il n’est guère facile d’imaginer aujourd’hui, dans le fracas de notre monde moderne, tout ce que représentait une église pour les hommes de cette époque lointaine. Seuls, quelques vieux villages du fin fond de la campagne peuvent nous en donner une idée. L’église était souvent l’unique édifice de pierre à des kilomètres à l’entour, c’était le seul édifice important de toute une région et sa tour guidait de loin les voyageurs ou les pèlerins. Chaque dimanche, tous les habitants de la localité s’y réunissait pour les offices ; le contraste entre le haut édifice et les habitations primitives ou ces gens passaient leur vie devait avoir quelque chose d’écrasant. Rien d’étonnant si toute la communauté s’intéressait à la construction de l’église et tirait orgueil de sa décoration. Même au point de vue économique, la construction d’un sanctuaire, qui durait des années, devait transformer la ville entière. L’extraction et le transport des pierres, l’installation des échafaudages, l’embauche d’artisans itinérants, qui apportaient avec eux des récits de régions lointaines, tout cela devait être, en ces temps reculés, un événement exceptionnel.

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Des siècles d’obscurité -relative- n’avaient pas effacé le souvenir des églises primitives, les basiliques, et des formes d’architecture employées par les Romains. Le plan adopté était généralement le même : une nef centrale conduisant à une abside ou chœur, flanqué de deux ou quatre bas-côtés. Parfois, certaines adjonctions venaient enrichir la simplicité de ce plan. L’idée plut à certains architectes de construire des églises en forme de croix, et c’est ainsi qu’ils ajoutèrent, entre le chœur et la nef, ce que l’on nomme un transept. Malgré la parenté du plan, l’impression générale produite par une église romane ou normande est bien différente de celle d’une basilique. Dans les basiliques primitives,  des colonnes classiques portent un entablement horizontal. Dans les églises romanes et normandes, on rencontre le plus souvent des arcs en plein cintre reposant sur des piliers massifs. L’impression d’ensemble, à l’intérieur comme à l’extérieur,  est celle d’une force tranquille. Peu de décors, peu de fenêtres, de solides murs pleins et des tours qui font penser aux forteresses contemporaines.

Ces puissantes masses de pierre élevées par l’Eglise, presque comme un défi, dans des pays d’agriculteurs et de guerriers récemment convertis, sont comme un véritable symbole de l’Eglise militante. Elles rappellent qu’en ce monde, le devoir de l’Eglise est de combattre les puissances de ténèbres, jusqu’à l’heure du jugement dernier.

 

(photo: abbaye de Durham, Angleterre)