Samedi après midi, veille d’une élection présidentielle concentrant l’attention nationale, quelque part dans le sud de la France , au pied de la montagne noire, je reçois un message du camarade Hop, me demandant d’écrire un texte.
Un texte, oui, quel thème ? Commenter l’actualité, nous le faisons depuis une bonne dizaine d’années , et si il reste, encore et toujours, des secteurs à décrire, des pierres d’achoppement entre gens de même sensibilité, nous avons un peu fait le tour de la question contemporaine. La perception que nous avons de ce monde, un monde hostile, en déliquescence avancée, provoque en nous révolte, dépression, stress, parfois amusant, espoir et déception. Atomisés dans un vaste ensemble qui nous dépasse, vampirisés par des cohortes de menteurs, profiteurs, coincés entre lobbys, organisations trans-nationales , et gouvernements terroristes, l’abattement est ,quelque part, la destination finale de ceux qui pensent avoir compris que la somme de bonnes volontés des personnes lucides ne pourront jamais l’emporter sur le coté noir de la force. Nous nous sommes trompés….depuis le début. Et le propos qui suit donnera un haut le cœur ou, du moins, le vertige à la plupart d’entre nous. Nous avons tué, il y a de cela 2000 ans, pour ne pas écouter cela.
De l’architecture.
Pour commencer ce voyage au cœur du mystère que nous avons volontairement oublié, il convient de faire un rappel sur la nature de la conscience.
Si vous deviez être partout à la fois, c’est-à-dire omniprésent, vous seriez, nulle part précisément. Lapalissade à la première lecture, il convient, pour suivre la suite du propos, d’admettre au fond de soi, cette logique simple. Le propre de l’expérience individuelle est de vivre une expérience précise, dans le temps et dans l’espace. La pointe du critérium écrivant sur la page du cosmos infini. La conscience individuelle est donc une expérience de limitation, et à la fois une expérience de grand détail, mettant du délai et de la distance avec les objets autour de vous.
Si vous deviez être une conscience cosmique, dans le cas ou vous n’êtes pas matérialiste, la perception serait plus large et moins définie. Plus vaporeuse. Distance et délai plus courts , jusqu’à disparaitre au niveau de la conscience ultime Et néanmoins non moins réelle que l’expérience de votre présente vie, à ce moment même ou vous lisez ces lignes.
Des différences de niveaux de consciences, nous en connaissons au moins deux. Et nous l’avons tellement intégré à notre expérience que nous y prêtons plus tellement attention.
Amusons nous à nous poser des questions. Au moment de notre sommeil, la nuit, lorsque nous rêvons, comment savons nous que nous rêvons ? Dans l’immense majorité des cas, y compris lorsque nous sommes face à des situations farfelues, nous l’ignorons. Le nez émotif collé à la situation onirique, nous sommes emportés par l’urgence, l’aventure, ou simplement en tant qu’observateur d’une situation dans laquelle nous n’intervenons pas. Il nous faut aussi une amnésie, afin de rendre le rêve réel. C’est-à-dire une perte d’information. Le fait d’oublier que nous dormons physiquement.
Acquérir une discipline et surtout un réflexe pour pouvoir faire un pas de recul, certains appellent cela le détachement, vis-à-vis de la situation onirique, afin de faire un test de réalité pour prendre conscience du rêve dans lequel nous sommes plongés. Rêve lucide qui gagne en précision à partir du moment ou la prise de conscience est faite.
Le fait de coller par nos émotions à une situation, qui est pourtant « dans notre tête », fait qu’elle nous parait totalement réelle. Qui n’a jamais eu peur de tomber d’une falaise ? Il faut donc un enjeu pour pouvoir rendre une situation réelle. Et inversement, il nous faut une situation qui nous parait réelle, pour faire l’expérience de sentiments. Boucle rétroactive.
Enjeu et amnésie sont les deux facteurs pour rendre une situation réelle.
Quelle différence entre le réve et la réalité actuelle ? Aucune si l’on se place au moment du vécu. L’inertie des situations permet simplement de différencier les deux. Quand vous vous couchez dans votre pavillon dans le département du Cher, vous ne vous réveillez pas dans un hotel à Tokyo. Le rêve est plus plastique que la réalité commune. Peu de différence entre le croque-mitaine qui nous poursuit dans nos rêves et Soros qui nous casse les bonbons en Europe. Différence de conscience, différence de fluidité.
Continuons.
Nous avons commencé par observer le monde extérieur. Nous avons omis d’observer notre monde intérieur. Là est notre erreur, ou du moins, notre tâche aveugle. Il est impossible de comprendre l’expérience que nous sommes en train de vivre, ou de rêver, sans mettre les mains dans le cambouis de notre intimité. Nous sommes des individus tri-partites, qui se confondent le plus souvent. Le plus facile à identifier est notre mental. Cette petite voix intérieure, ce dialogue perpétuel à l’intérieur de nous. Nous dialoguons avec nous même , parfois sans arrêt. Le plus difficile à discerner est la part de conscience et ce qui revient à l’égo. Et l’expérience qui permet de mettre en relief ce qui revient à l’égo est, paradoxalement, sa dissolution. Dans le même mouvement, la conscience apparait de façon plus claire. Conscience , ego et mental, la sainte Trinité exprimée en sein l’individu. 3 personnes en une. Nous redécouvrons l’eau tiède.
Corrélation entre l’intérieur et l’extérieur ? Rappelons que la conscience individuelle est une expérience limitée et précise. Elle admet une frontière, par sa limitation, entre un intérieur et un extérieur. Point d’observation double tourné à la fois vers un extérieur avec délai et distance, et un intérieur instantané.
L’expression de la conscience individuelle est également une expression particulière, et partielle , tout en contenant le Tout, de la conscience universelle diffuse. Cette charnière ouvre le champ des possibles à la compréhension de notre situation actuelle. Ce regard au sein de cette expression particulière admet que l’extérieur est la projection de notre esprit. Nous sommes les créateurs de notre environnement extérieur et pas seulement avec nos petites mains. Nos émotions et nos pensées sont plus que des choses anodines et intimes, elles sont des énergies, ou leurs traductions, qui donnent vies aux objets extérieurs. L’externationalité de notre intérieur. Les anciens Tibétains le savaient. Le Bardo Thodol met en lumière ce caractère créateur. Dans un état de conscience élargi , ou modifié, permet de rendre compte de ce caractére créateur. Plus la conscience est large, plus les délais et les distances sont courtes, mettant en lumiére cette relation entre l’intérieur et l’extérieur et ce lien créateur dont nous sommes à l’origine dans une expression particulière lorsque nous sommes incarnés. L’expérience la plus significative de la vie de Jésus est sa quarantaine dans le désert. 40 jours dans le désert, et nous nous rendons compte de plusieurs choses. Nous prenons conscience que nous ne sommes pas notre corps physique, il est un véhicule terrestre qui nous permet de vivre une expérience de limitation . Nous ne sommes pas le nom de notre état civil, c’est un avatar égotique que nous avons choisis consciemment avant de refaire l’expérience terrestre. Nous sommes le cosmos qui a décidé, dans sa dynamique perpétuelle, de vivre une expérience précise et limitée. Nous nous admirons de l’intérieur lorsque nous sommes sous la Voie Lactée par une nuit d’été. Et nous sommes tellement puissants que nous avons décidé de l’oublier et de nous incarner simultanément dans chaque expérience humaine. Et oublier que nous sommes pleinement responsables de notre monde par notre facteur créateur. Il n’existe pas de complot ou d’hostilité extérieure. Nous sommes l’alpha et l’omega. Nous sommes le cosmos. Et le vertige survient lorsque ce rêve partagé est perturbé par cette vérité. Le barbu palestinien nous avait laissé des indices. Nous nous sommes laissés des indices ,devrais je dire. Le Royaume de Dieu est à l’intérieur de nous. La vérité nous affranchissant de la mort. Cette mort qui est, en réalité, cet enjeu initial qui nous permet de nous accrocher à ce rêve collectif, comme si c’était la première et la dernière fois. Nous ne mourrons pas. Notre corps connait un début et une fin, notre conscience revient à elle-même à chaque fois qu’un voyage terrestre se termine. L’inconscient jungien, en réalité, hyper conscient non matériel.
A partir de là, ce gouffre s’ouvrant sous nos pieds, vient, naturellement, l’attitude à suivre pour contrôler et orienter ce caractère créateur.
Se détacher de ce rêve collectif. L’observer avec ce détachement émotionnel. Le fait de vouloir faire une révolution extérieure, sans être passé au feu de soi même, le soi non égotique, est une impasse totale, ou nous nous perdons en oubliant que nos pensées et émotions créent les monstres contre lesquels nous prétendons combattre.
Lacher-prise, ce concept que je pensais sortie de la tête de femme d’âge mûr, est l’étape seconde.
Ne plus se battre et acceptez la situation dont laquelle nous sommes individuellement. Nous avons choisis nos parents, notre physique, nos vies, personne n’a décidé à notre place. Nous avons aussi décidé de vivre cette expérience politique qui nous préoccupe, elle est notre projection. Il n’existe pas de complot ou de comptable cosmique qui nous oblige à vivre telle expérience ou non. La punition, nous nous l’infligeons nous-mêmes. La récompense également. Le cosmos est circulaire. Aime ton prochain, comme toi-même, car, toi, c’est lui. Simple. Vérité biblique. Jeu de miroirs.
La paix intérieure, et l’esprit de compassion pour les autres expériences de conscience que l’on côtoie tous les jours, changent plus le monde extérieur que n’importe quel combat, militantisme de terrain ou je ne sais quoi. La réalité est plus fluide, si nous décidons qu’elle peut l’être. Si nous faisons le choix, là est notre liberté, de continuer à nous perdre nous-même, évidemment, nous y arriverons.
Demain, il y a une élection. Je sais qu’elle représente, quelque part , un enjeu pour les co-créateurs qui échangent sur le blog de notre pote Hoplite. Nous n’avons à placer ni espoir, ni déception ou peur. L’observation neutre suffit. Notre avenir, nous le connaissons déjà. Avez-vous déjà révé de votre propre mort ? Jamais, notre film se termine toujours bien. Nous nous amusons à nous faire peur.
Notre être, notre cosmos, nous sommes fractales, holotropique et circulaire.
La mort suppose la vie. Le bien suppose le mal. La lumière suppose les ténèbres. Moi suppose Toi
Soros suppose Jésus Christ.
Je tiens à remercier plusieurs autres noms. Alan Watts, Timothy Leary, Albert Hoffman , Le Christ, Saint Thomas et son évangile, Bouddha, Les tibétains anciens, Terrence Mc Kenna, John Lilly, Maitre Eckhart , et ceux que j’oublie, ainsi que mon putain de voisin qui m’a initié.
Ps : Ce texte n’est pas soumis à la polémique, dans le sens de conflit de chapelles. C’est une expérience à vivre. Il n’est que pour rendre compte. La croyance, c’est-à-dire la distance, n’a pas lieu d’être.
Three piglets.